Dargaud : Antarès T6, Stern, Le magicien de Whitechapel T2, Griffe blanche T3

/ Critique - écrit par plienard, le 14/09/2015

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La pré-rentrée chez Dargaud est de qualité avec les 4 albums que je vous propose de découvrir. De la science-fiction, de la magie, de l’héroïc-fantasy et du western, les éditions Dargaud montrent tout l’éclectisme dont ils sont capables.

Antarès – Tome 6 : épisode 6 – note : 8/10

Il est des séries auxquelles on reste viscéralement attachées, sans que l’on sache réellement bien pourquoi et celle sur les Mondes d’Aldébaran sont de celles-là. Et pourtant au premier abord, ce n’est pas gagné.  Des personnages raides comme des piquets, des relations amoureuses dignes d’une télénovela brésilienne, les albums de Léo pourraient se voir « gratifier » de ces adjectifs pas forcément élogieux. Et pourtant ça marche, car il y a maintenant « ce style Léo » reconnaissable entre mille et surtout il y a beaucoup plus que ces adjectifs. On sait ce que l’on va trouver, avec ses réflexions sur la société, sur l’homme, la place de la femme dans la société, des thèmes scientifiques et de science-fiction avec ses fameux extra-terrestres et cet idéal – utopique ? – d’un monde meilleur, fraternel et égalitaire.


©Dargaud édition 2015.

Le troisième cycle des mondes d’Aldébaran prend ici fin avec le sixième album consacré à la planète Antarès et dans lequel Kim Keller va encore vivre de sacrées aventures. Et en premier lieu celle de retrouver sa fille, Lynn, disparue mystérieusement après avoir été touchée par un étrange rayon lumineux dans le tome 3. On est bien dans un album traditionnel de Léo, mais ce sixième tome a quelque chose en plus. Contrairement aux dernières et récentes séries du brésilien, ce tome 6 est en quelque sorte l’épilogue du cycle des Mondes d’Aldébaran. Plus dense que les autres albums dans son déroulement, il contient aussi un résumé de 4 pages sur les aventures précédentes de Kim et un entretien final avec l’auteur Léo sur 3 pages. Il projette surtout son héroïne dans un avenir palpitant et qui nous laisse l’eau à la bouche. Mais cela fera-t-il l’objet d’un nouveau cycle. Rien n’est moins sûr.

 

Le Magicien de Whitechapel – Tome 2 : Vivre pour l’éternité – note : 7/10

André Beniest, dit « Benn », est l’auteur complet de ce triptyque annoncé chez Dargaud dans un graphisme imagé, fin et profond qui plonge plus souvent dans l’obscur que dans le clair à l’image de la destinée de Jerrold Piccobelllo, le personnage principal.


©Dargaud édition 2015.

Pour rappel Jerrold a perdu son maître, victime de la vengeance d’un mari trompé et a vendu son âme au diable. Ce dernier doit lui permettre de devenir le plus grand magicien du monde, d’autant qu’il va donner une représentation exceptionnelle à la tour de Londres lors du jubilé de la reine d’Angleterre. Et c’est accompagné de Céleste, son amour et assistante, qu’il prépare cet événement, sûr de lui. D’autant qu’il est immortel !

On suit la montée en puissance du magicien dans ce deuxième tome jusqu’à un final assez sanguinaire et dérangeant. Dans un style graphique qui n’est pas sans rappeler celui de Fred, le papa de Philémon, mais dans un univers totalement différent, exempt de toute poésie car on traite ici avec le diable ! Le personnage fait souvent preuve de légèreté, de liberté à la limite de la trivialité. Il y a d’ailleurs une certaine tension sexuelle dans l’album. Le tout est agrémenté de dialogue à la fois châtié et éloquent. Les textes sont de qualité mais le lettrage n’aide pas à la lisibilité de la lecture. C’est le point noir de l’album. Il n’est pas rare de s’y reprendre à deux fois pour être certain d’avoir bien compris. D’un autre côté, le vocabulaire utilisé est riche et supérieure à de nombreuses bandes dessinées. 

Le rythme de l’album est assez soutenu, et le personnage de Jerrold se laisse griser par sa notoriété grandissante et sa toute nouvelle puissance. Il ne se rend pas compte qu’il commence à perdre pied, entrainant avec lui Céleste.

 

Griffe blanche – Tome 3 : La voie du sabre – note : 7.5/10

L’art de raconter des histoires est un art difficile tant les lecteurs sont multiples et qu’il est compliqué de tous les satisfaire. Serge Le Tendre est de ceux qui tentent souvent ce pari et il le fait généralement avec l’aide d’un dessinateur. La quête de l’oiseau du temps (avec Régis Loisel) est sans doute son succès le plus retentissant. Mais n’oublions pas Jérôme K. Jérôme Bloche, ou encore Chinaman qu’il signe avec Taduc.


©Dargaud édition 2015.

L’armée de Suo-le-Rouge doit être arrêtée si le pays du Suhiman ne veut pas tomber dans la tyrannie. La bataille se fera dans la vallée des mille parfums sous l’œil des dieux. Mais quel parti vont-ils choisir ? Dans ce combat entre le bien et le mal, un autre combat va prendre place, celui de l’honneur d’une famille.

On retrouve le duo de Chinaman sur le triptyque Griffe blanche aux éditions Dargaud. Et il démontre dans ce tome qu’il a un certain talent – s’il était encore possible de douter – à nous raconter des histoires et nous mettre sur de fausses pistes. Car la lecture de ce dernier tome va totalement nous étonner. Rien de ce qu’on a pu lire dans les deux premiers albums ne pouvait laisser présager un tel déroulement. Les auteurs ont délibérément cachés le passé de Griffe blanche et le ressortent ici pour ce qui va décider du sort des contrés du Suhiman.

Un dessin magnifique, une trame inattendue, le triptyque finit en apothéose. Et pour ceux qui ont raté le début, il n’est pas trop tard.

 

Stern – le croque-mort, le clochard et l’assassin – note : 8/10

Les croque-morts en western semblent être au goût du jour en ce moment aux éditions Dargaud. Après le très remarqué Undertaker de Xavier Dorison et Ralph Meyer, les frères Maffre, Frédéric et julien, signent un one-shot avec les mêmes ingrédients, un croque-mort au far west. Le parallèle s’arrête là car les personnages sont foncièrement différents.


©Dargaud édition 2015.

Elijah Stern, le « héros » de Frédéric (le scénariste) et Julien (le dessinateur) officie dans la ville de Morrison, dans le comté de Coffey au Kansas. Pas vraiment apprécié par la communauté, ce jeune fossoyeur tout malingre est appelé pour débarrasser le corps de Charles Bening, une grosse barrique alcoolique, mort dans un bar à putes. Sa femme, membre éminent d’une ligue anti-alcoolique, veut faire un exemple et veut récupérer ses organes. C’est alors que Stern découvre qu’il n’est pas mort par accident.

Avec un personnage atypique, solitaire et secret, cet album se révèle être passionnant. Présentant une fêlure dans son passé, celui-ci a fini par le rattraper. Mais Stern n’est pas le seul à avoir quelques casseroles. Une intrigue digne des romans d’Agatha Christie et un dessin qui ne laisse rien au hasard, permet d’apprécier au plus haut point cette histoire. Les auteurs distillent de nombreuses informations tout au long du récit, tant dans les dialogues que dans les dessins. Un regard, une phrase, le puzzle des frères Maffre ne vous sera révélé qu’à la fin de la lecture, sauf si vous faîtes preuve d’une grande sagacité.