Sorties Dargaud : Sugar, Black Op saison 2, Orféa, Perico et La porte de Brazenac

/ Critique - écrit par plienard, le 18/03/2014

Tags : comics black integrale dargaud avengers dessin tome

Cinq albums ont attiré notre attention dans les dernières sorties Dargaud.

Cinq albums composent cet article montrant la grande différence de style, de narration et de sujet qui peut exister dans le média. Et c'est chez Dargaud.

Sugar – note 5.5/10


DR.

Les éditions Dargaud proposent un étrange album à la couverture bleue-nuit avec un chat noir et un regard perçant jaune. Œuvre de Serge Baeken, cet auteur vous est peut-être inconnu. Il a travaillé pour de grands hebdomadaires belge et néerlandais et a son propre magazine de BD. Il est aussi le dessinateur officiel de la ville belge de Turnhout.

Dessinateur peu conventionnel dans son dessin, ou plutôt dans l’organisation des cases, il le prouve, ici, avec un album sur son chat. Disons même le monde vu par son chat. 80 pages de 24 cases chacune en noir et blanc. Mosaïques de décors, formant un tout, ou juste succession d’action, l’album a de quoi étonner et émerveiller par la justesse du propos, la méticulosité et la qualité des dessins.

Serge Baeken est un artiste dans ce qu’il y a de plus beau, mais aussi de plus mystérieux. Il aime les chats, son chat, au point qu’il l’humanise presque, au point qu’il fait sa biographie. On reste pourtant dans la réalité de la vie de l’artiste. Ce n’est pas du Félini, mais du félin. L’auteur et le chat-personnage ne font qu’un. Au point qu’on se demande qui a inspiré l’autre.

Ce n’est pas une bande dessinée conventionnelle ou classique. Elle ne touchera peut être pas le public habituel. Pourtant ceux qui aiment les chats et ceux qui aiment être étonnés seront sans doute séduits.

 

Black Op – note 7,5/10

Les opérations noires sont de retour chez Dargaud. Sa série Black Op revient avec un tome 7 et toujours Stephen Desberg et Hughes Labiano, respectivement au scénario et au dessin.


DR.

On est à la veille d’un choc que les Américains ne soupçonnent même pas. Et s’ils envoient un couple créé de toutes pièces, Sol et Janine, c’est pour écarter les rumeurs et surveiller le ministre iranien du pétrole, Shinan Khan.

C’est avec une certaine joie que l’on retrouve la saison 2 de Black Op. Derrière cette expression américanisée se cache tout ce que les opérations secrètes et illégales américaines peuvent avoir de sombres. Nous sommes ici à la veille du choc pétrolier de 1973. On comprend à demi-mot qu’il va être provoqué par une guerre mettant en scène Israël, l’Égypte et certains pays de l’OPEP. Dans ce contexte historique, Sol Kathren est envoyé espionner le gouvernement iranien en compagnie de sa femme, Janine, qui s’occupera de séduire le ministre iranien du pétrole. Un faux couple, donc, qui a du mal à s’entendre, tant les différences entre les deux personnages sont immenses.

L’un est pro-gouvernemental et voit en Nixon le sauveur du pays. Alors que l’autre, Janine, n’est pas dupe du gouvernement Nixon et de sa chasse aux sorcières utopiques. L’un et l’autre ont pourtant en commun de regretter la dérive de leur « beau pays », mais pas pour les mêmes raisons.

Une belle opposition de personnages, nimbée dans un contexte historique fort dont on connaît l’issue. L’important est vraiment de savoir ce qu’il va arriver à Sol et Janine.

Hughes Labiano nous régale de son trait expressif. Et après son passage au Moyen-Orient avec le récent Les quatre coins du monde, on le retrouve dans le même décor mais à une période encore plus proche de nous.

 

Perico – note 7,5/10


DR.

Philippe Berthet est de retour dans une nouvelle collection chez Dargaud. L’auteur de Pin up (10 tomes depuis 1994), de Les exploits de Poison Ivy (2006) et de Nico (trois tomes) inaugure avec Perico la collection Ligne Noire de Dargaud, dédiée au polar et dont il sera le dessinateur exclusif.

Il débute ici avec un autre grand nom du 9ème art, Régis Hautière, l’actuel scénariste d’Aquablue (http://bd.krinein.com/aquablue-13-septentrion/) et de la remarquée (-able) série La guerre des Lulus. Il signe ici un polar cubain tout à fait impeccable, se déroulant dans les années 60 juste avant l’arrivée de Castro au pouvoir. La mafia y blanchit  son argent en toute impunité. Quant à  Joaquim Lima, lui, il est juste employé dans le casino de M Trafficante (qui porte bien son nom). Il va y rencontrer la belle Elena qui débute dans la chanson. À cause de son frère, Joaquim va se retrouver en possession d’une mallette pleine de dollars et être obligé de fuir. Il va alors emmener la jeune femme.

Un polar au contenu un peu convenu, rehaussé par le dessin de Philippe Berthet, mais qui finit avec de belles promesses et un road-movie intéressant à venir.

 

La porte de Brazenac – note 7/10

La porte de Brazenac n’est pas une nouvelle sortie du périphérique parisien. C’est bien le nouvel album de Léo et Rodolphe (scénario) et Patrick Pion (dessin) dans la belle collection Long Courrier des éditions Dargaud.


DR.

On connaît bien les scénaristes pour leurs superbes séries Kénya et sa suite Namibia, mélangeant science-fiction et extra-terrestres dans une sorte de pré-guerre des mondes. Ici, les auteurs nous surprennent en changeant radicalement d’univers et d’époque. Nous sommes à la fin du XVIIIème siècle, en 1777 plus exactement. Le baron Pierre de Brazenac est le dernier descendant d’une lignée « aussi glorieuse que désargentée ». Lors d’un orage terrible, il va recevoir la visite d’un voyageur égaré, Damien de Beltoise, précepteur du jeune prince de Condé. Les deux hommes sympathisent et le baron lui fait part d’une mystérieuse découverte. Une plante encore jamais recensée qu’il a découverte dans sa propriété.

Chassez le naturel, il revient au galop. Léo et Rodolphe sont des adeptes de l’étrange, du fantastique et de la science-fiction. Ils imaginent, ici, une porte « temporelle » qui permettrait de passer d’une époque à une autre. Mais dans cette histoire, l’aspect scientifique est très marginal et est le prétexte pour une belle histoire où le comportement humain devant l’ignorance est mis en accusation.

Patrick Pion signe ce beau récit. L’auteur de Cœur de glace, autre album de la collection Long Courrier, ne dément pas son talent dans un style un peu baroque qui donne l’authenticité à l’histoire. Malgré une couverture qui n’est pas des plus plaisantes, on plonge dans cette histoire avec plaisir.

Long Courrier justifie une fois de plus sa réputation et la porte de Brazenac vient l’enrichir sans coup férir au milieu des Atar Gull, où le regard ne porte pas et autre Lydie.

 

Orphéa – note 6/10

François Corteggiani se lance dans le mysticisme avec cet album, Orféa, aux éditions Dargaud.
DR.

Le scénariste de La jeunesse de Blueberry s’est attaqué aux démons et autres forces sataniques. Une histoire diabolique dans laquelle le dessinateur Emmanuel Barison s’en donne à cœur joie. Le duo d’auteur n’en est d’ailleurs pas à première collaboration. De silence et de sang, Tatiana K, ou Docteur justice sont là pour en témoigner.

Orféa est une jeune femme qui perd son fiancé. Ce dernier s’est pendu dans sa cellule alors qu’il avait tué un homme. Elle panique lorsque l’âme de celui-ci sort de sa tombe pour lui demander de le rejoindre. Et son calvaire n’est pas fini. Trois hommes, qui ne sont en fait que des démons, tentent de l’agresser. Heureusement, un vieux monsieur, M Sabato, qui passait par là (par hasard ?), vient lui porter secours. Mais Sabato n’est pas celui qu’il paraît être.

Une aventure assez palpitante, menée tambour-battant où les temps de pause sont extrêmement court pour les personnages comme pour le lecteur. Cependant, tout s’enchaîne un peu trop naturellement et l’acceptation des événements par Orféa apparaît trop facile et rapide. Mais il faut accepter de rester sur sa faim et en accepter le déroulement car la conclusion elliptique le permet pour les auteurs.