Les « French comic book artists » à l’assaut de Marvel
Bande Dessinée / Article - écrit par Guillom, Hugo Ruher, Julie.TB et Meojifo, le 12/02/2014Philippe Briones, Paul Renaud, Olivier Coipel… Ils sont une poignée de Français à faire des merveilles sur les planches d’un des piliers du comics, Marvel. Krinein a rencontré les deux premiers dessinateurs, à l’occasion de leur passage au Toulouse Game Show. Portraits croisés de ces super-héros du croquis à la française.
Photo: Julie.TB
On ne s’improvise pas passionné de comics, Philippe Briones et Paul Renaud peuvent en témoigner. À l’heure à laquelle les enfants découvrent à peine les joies de la scolarité, ces deux dessinateurs-nés nourrissaient au contraire un projet professionnel clair : rejoindre les rangs de Marvel.
« J’ai commencé à dessiner à 3 ans, explique Philippe Briones, qui illustre depuis une petite dizaine d’années les pages des X-Men Legacy ou Iron Man Legacy, publiés par le concurrent historique de DC Comics. À 10 ans, je savais que je voulais travailler pour Disney et Marvel. Le jour venu, j’ai intégré les écoles qui allaient me permettre d’y parvenir. »
Au terme de ses études dans la prestigieuse école des Gobelins, Philippe Briones entre à Disney. Il collabore à la réalisation de huit films, dont Tarzan. Mais, grâce à un coup de pouce de son entourage, le dossier qu’il a patiemment monté pour intégrer Marvel atterrit sur le bureau de Joe Quesada, alors éditeur en chef de la maison d’éditions. C’est le début du rêve américain pour le Dijonnais.
Ce rêve, Paul Renaud y goûte, pour sa part, grâce à la magie d’Internet : « Des collectionneurs ont posté mes travaux sur la toile, raconte-t-il, entre deux croquis de Spiderman et de Vampirella, qu’il publie désormais sur les couvertures des comics Outre-Atlantique. Dans un premier temps, j’ai été contacté par de petits éditeurs, et très rapidement par Marvel. Moi qui ai passé toute mon adolescence à dévorer les Strange et à me passionner pour les aventures des Vengeurs, j’ai tout de suite accepté ! »
Marvel, paradis des illustrateurs ?
Aujourd’hui, pas question d’envisager une reconversion professionnelle. Malgré la distance et un rythme de création soutenu, les deux Frenchies ne boudent pas leur plaisir de travailler pour l’un des deux géants américains du comic-book.
« Je ne vais aux Etats-Unis qu’une fois par an, estime Paul Renaud, qui a fait de l’illustration de covers sa spécialité, le tout depuis Toulouse. Pourtant, je suis en contact permanent avec mon éditeur. J’apprécie cette proximité, et le fait de sentir l’enthousiasme chez mes collaborateurs. Quand on est dessinateur de BD franco-belge, on peut passer des mois sans nouvelles de son éditeur, parce qu’ils n’ont pas les moyens de suivre toutes les productions au jour le jour. C’est parfois difficile à vivre. Mais ce sont deux cultures différentes ! »
Après son expérience à Disney, Philippe Briones apprécie également de pouvoir cultiver son propre style, mélange « de recherche esthétique, d’élégance, de puissance et de simplification », et le mettre au service de ses personnages préférés (les X-Men, comme Paul Renaud, et en particulier Colossus et Diablo). Il reste cependant lucide sur les conditions de production qu’impose Marvel à ses artistes.
« En général, on nous demande de produire 20 pages par mois. Or, il ne s’agit pas seulement de dessiner, il faut aussi s’approprier les personnages, et ce d’autant plus vite qu’on ne reste sur le même univers que pendant 3 à 5 numéros ! Sans oublier les retards éditoriaux, ou de scénario, qui peuvent amener Marvel à réduire la pagination, sans augmenter, bien sûr, nos délais de livraison. Mais le plaisir de donner à voir au lecteur les personnages tel que je me les imagine l’emporte sur le reste. »
BD franco-belge ou comics… L'impossible choix
Si les crayons des deux dessinateurs croquent du Marvel, ils n’en délaissent pas pour autant la BD franco-belge. Dans ses projets pour 2014, Paul Renaud s’est ainsi lancé dans un projet made in France qu’il attendait depuis longtemps : « J’ai souvent reçu des propositions de scénario, qui ne m’ont jamais vraiment transcendé. En plus de me flatter par l’intérêt qu’il porte à mon travail, le scénariste qui m’a contacté, m’a proposé cette fois-ci une trame très intéressante, sur laquelle je travaille actuellement. L’idéal pour moi, désormais, serait de faire au moins un comics et un album par an. »
Lorsqu’on l’interroge sur la collaboration dont il est le plus satisfait, Philippe Briones n’hésite pas non plus à évoquer ses incursions dans la BD franco-belge, dont Geek Agency, une série sur laquelle il travaille avec Romain Huet. Mais, au fil de la conversation, il se prête à rêver de pouvoir un jour publier ses propres super-héros, inspirés des Colossus, Angel et autres Sasquatch, qu’il avait créés adolescent… Une double influence du comics et de la BD franco-belge qui, en plus de leur talent, signe peut-être la clef du succès des Français chez Marvel.
Et puis si vous voulez en savoir plus sur Philippe Briones qui nous parle de son univers et de la guerre Marvel/DC, c'est ici!