7.5/10Les Chevaliers Dragons : politique et sacs à main

/ Critique - écrit par athanagor, le 26/01/2011
Notre verdict : 7.5/10 - Le choix des femmes (Fiche technique)

Tags : dragon tome chevaliers dragons main prix origine

Cet album, s'enfonçant un peu plus dans l'examen des mécanismes internes de l'Ordre, réussit un mix entre tension psychologique et action, et offre son tour au très bon Looky, selon l'habitude des scénaristes de changer de dessinateur à chaque tome.

En plein milieu du désert, les chevaliers dragons se retrouvent, selon un cycle immuable, pour discuter politique et choisir leurs futurs soldats. La politique c’est en haut que ça se passe, sous l’égide de l’ancienne, qu’il conviendra
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de réélire à la fin de la séance, et selon l’arbitrage impartial d’une matriarche de clan, désignée pour l’occasion. Pour la sélection, c’est en bas. De très jeunes filles, choisies dans chaque clan pour leur valeur, doivent passer des épreuves brutales et sanglantes, dont  peu d’entre elles sortiront vivantes. Entre pressions psychologiques et épreuves physiques, c’est ainsi que le sort de l’ordre se joue, toutes les mille et une lunes.

C’est maintenant une habitude de voir ANGE utiliser les chevaliers dragons comme fond d’une mise en scène de thèmes politiques, moraux ou psychologiques. Se servant, avec plus ou moins de bonheur, de ces jeunes filles à l'innocence sacrifiée, ils posent des situations allant bien au-delà de la simple chasse au dragon pour explorer des comportements sociaux, collectifs ou individuels. Ainsi avons-nous pu relever, chez Krinein, des thèmes comme l’esclavage (tome 7), les liens entre violence et excitation, ou encore l’ostracisme qui frappe les plus démunis (tome 8), et à l’inverse, les obligations découlant d’une position sociale, que celle-ci soit choisie ou non (tome 10). Ainsi, ce tome respecte la ligne des auteurs, en se plongeant toutefois dans des considérations moins personnelles que précédemment. L’ivresse du pouvoir, qui transforme des démocrates en despotes quand la pression devient trop forte ; les comportements et caractéristiques accessoires, focalisant pourtant l’attention car défiant la morale ; les limites dans lesquelles la hiérarchie et le protocole doivent subsister, voilà les thèmes qu’abordent ici les auteurs.

Sans réussir à mener leurs sujets avec autant de finesse que dans Le chœur des ténèbres, ils n’en restent pas moins d’habiles metteurs en scènes qui brodent le fil de leur récit
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avec une facilité et un naturel troublant, qui n’a d’égal que la qualité de leurs dialogues. De plus, cette lecture prend une teinte étrangement réelle et presque prophétique à la lumière de l’actualité. Mais on fera sans mal abstraction de celle-ci pour s’apercevoir que le travail s’inspire plus de la période que du moment, et plus de l’atmosphère de son époque que d’événements particuliers, qui n’en sont finalement que les conséquences.

Comme à son habitude, Looky (c’était son tour pour ce tome) nous régale de son trait vivant et incisif, d’une capacité d’immersion et d’une maturité rare, qui donne vie et âme aux protagonistes dont les souffrances sont le plus souvent intérieures. C’est toujours avec admiration qu’on constate que le défi de représenter ce qui est suggéré est réussi, comme c’est le cas ici dans les hésitations des personnages autour de la dernière épreuve, qu’on comprend aussi être la plus dur malgré son apparente simplicité.

Loin d'un classique en devenir, cet album n'en est pas moins un très bon cru, à l'aune de cette collaboration, offrant un excellent moment d'aventure, riche et développé, que l'on aura sûrement plaisir à relire avant le prochain tome.