7.5/10La Femme accident - 1ère partie

/ Critique - écrit par riffhifi, le 13/05/2008
Notre verdict : 7.5/10 - L’homme, lui, en a trente-deux (Fiche technique)

Pour les 20 ans de la collection Aire Libre, Denis Lapière offre au dessinateur Olivier Grenson un récit émouvant et juste.

La collection Aire Libre de Dupuis, espace de liberté offert aux auteurs pour développer des récits généralement intimistes et personnels, fête cette année ses 20 ans d'existence. L'occasion de ressortir les titres les plus prestigieux du catalogue (SOS Bonheur, Le Sursis), et de donner un coup de pouce promotionnel aux nouveaux titres, comme cette Femme accident qui le vaut bien. Le premier tome du diptyque est proposé sous deux versions, une simple à 14,50 euros, et une édition spéciale à 18 euros tirée à 2500 exemplaires, complétée de quinze très belles pages de dessins de Grenson, et d'une page d'explication de la genèse du projet.

Julie est en prison. Du fond de sa cellule, elle attend la venue de son petit garçon
en se remémorant les évènements qui l'ont menée à ce moment. Sa jeunesse à Charleroi, ses premiers émois amoureux et ses premières déconvenues relationnelles... Et les dérives de sa vie jamais heureuse, jamais satisfaisante...

Forcément incomplète, cette première partie appelle la deuxième des deux mains, construisant par petites touches le portrait du destin accidenté de la femme accident. Sensible et émouvant, le récit devait à l'origine se dérouler en Bretagne (le projet est vieux de plus de 10 ans) avant que Lapière ne décide de l'ancrer dans la Belgique natale du dessinateur Olivier Grenson (connu notamment pour son travail sur Niklos Koda aux éditions le Lombard). Grand bien lui en prit : l'accent de sincérité et la nostalgie qui découlent des images doivent certainement beaucoup à ce choix. Comme souvent cependant dans les albums au dessin trop réaliste, on peut regretter un statisme assez gênant par endroits ; la joliesse et la douceur des
visuels sont un contrepoint intéressant aux paysages grisouillants de Charleroi, mais occultent un peu la violence induite par certaines scènes.

Le travail sur les couleurs de Grenson, splendide, apporte de la chaleur à une histoire qui aurait pu être réfrigérante par la dureté de son sujet. La prison pour femmes et le chemin qui y mène, il y a plus joyeux pour égayer une soirée de lecture. Pourtant, le récit de la vie de cette femme se lit avec plus de tendresse que d'angoisse, et l'on attend avec impatience la sortie du deuxième tome, d'une part pour apprendre quels torts sont précisément reprochés à Julie, d'autre part pour avoir le plaisir de la voir enfin sortir de prison et retrouver son fils... en espérant que les auteurs ne jouent pas un mauvais tour à leur héroïne, à laquelle on est déjà prêts à tout pardonner.