7/10Animal lecteur - Tome 1 - Ça va cartonner !

/ Critique - écrit par riffhifi, le 18/05/2010
Notre verdict : 7/10 - Virus animal (Fiche technique)

Tags : animal lecteur salma tome libon sergio dupuis

Le monde des amateurs de BD, lecteurs et libraires, croqué par Sergio Salma et Libon. Un peu répétitif sur la longueur, mais beaucoup de justesse et de malice.

Libon, dont le nom est désormais bien connu grâce à ses séries Jacques et Hector Kanon, anime la série Animal lecteur dans le magazine Spirou depuis janvier 2006 sur des textes de Sergio Salma. Usant de la forme peu courante du strip vertical, les deux zigs y abordent le monde de la bande dessinée avec tendresse et dérision, offrant un rendez-vous sympathique repris depuis quelques mois sur le
site bdzoom, pour accompagner leurs articles sur les meilleures ventes bd.

Figure centrale de l'album, le gérant de la librairie fictive BD Boutik a du mal à gérer la surproduction galopante qui touche le neuvième art depuis quelques années. Autour de ce sujet, on trouve bon nombre de gags sur la difficulté à écouler les stocks, l'impossibilité de fournir tous les lecteurs, les problèmes de classification... La question du volume excessif, avec sa ritournelle « Y a trop », finit par être le running gag un peu systématique d'un strip qui a mieux à offrir par ailleurs : le regard pertinent porté sur le lectorat des bandes dessinées, balayant à la fois le grand public et les connaisseurs éclairés, est à l'origine de quelques gags bien sentis qui font le sel d'Animal lecteur. On reconnaît ainsi la hiérarchisation instinctive qui est faite entre la "vraie" lecture (Zola, Balzac), la lecture "bas de gamme" (SAS, Marc Lévy) et la lecture de BD (un cran au-dessus de la lecture de manga)... Ironie, finesse d'analyse et autodérision font partie des cordes de l'arc (de la harpe, donc) de Salma et Libon, à qui on reprochera tout juste d'omettre quelques cibles (les lecteurs de comics, oubliés au
profit du duel entre franco-belge et culture manga), et de privilégier la citation des séries Dupuis à celles des petits camarades (qui ne sont pas oubliés pour autant).

Toute mordante qu'elle soit, la chronique du monde de la bd ne se hasarde pas à mordre directement les fesses des confrères (ce qui serait effectivement malvenu), et les piques trop directes remplacent le nom des victimes par un raturage poli qui, malheureusement, a tendance à pourrir l'effet comique. « Alala, c'est nul comme une bd de #####. » Mettre le nom serait vilain (ce serait de l'humour façon Timsit), mais ne pas le mettre rend la phrase bien fade.

Mais dans le registre délibérément nombriliste qu'il occupe fièrement, Animal lecteur a le mérite de proposer un regard sur la phase la moins explorée de la vie d'une œuvre : la commercialisation et la réception par le public. Et le tout est aussi agréablement écrit que rigolotement dessiné.