8/10Les Aigles de Rome - Livre I

/ Critique - écrit par riffhifi, le 16/11/2007
Notre verdict : 8/10 - Alix Cooper (Fiche technique)

Une reconstitution cruelle et crédible de la Rome du temps de Jésus Christ. Enrico Marini passe brillamment au scénario tout en restant un artiste généreux en lyrisme.

Enrico Marini, c'est le dessinateur de Rapaces et du Scorpion. Disons que c'est essentiellement à ces séries qu'il doit sa renommée, et c'est sans doute parce qu'il est associé à elles que ce premier volume des Aigles de Rome a bénéficié d'une grosse sortie, immédiatement récompensée par un succès rare pour une série débutante. Ce premier effort de scénariste pour Marini devrait même survivre facilement au côté hype de sa sortie, car l'auteur le mérite...

Rome. L'album commence quelques années avant la naissance de Jésus Christ et se termine quelques années après. Pourtant, rien n'est plus loin que le barbu pacifiste des préoccupations des personnages ! Marcus, fils du cruel Titus Valerius et d'une barbare soumise, fait la connaissance de Ermanamer, un jeune Chérusque envoyé par son père à Rome comme gage de bonne entente. Renommé Arminius, le jeune barbare va être éduqué avec Marcus, à la dure. Sous la houlette de l'ancien gladiateur Volcanus, les deux jeunes gens sont destinés à ne pas rigoler tous les jours.

This... is... Roma !..


Le moins qu'on puisse dire, c'est que la reconstitution proposée par Marini est crédible. Il s'est penché sur le monde romain durant cinq ans, accumulant les éléments les plus divers pour aboutir à ce récit plein de cruauté où le Romain n'a, dès son plus jeune âge, que du mépris pour les esclaves qu'il croise ; où le père n'hésite pas à menacer son fils de mort s'il ne se conforme pas à ses attentes ; où le sexe et l'amour sont confondus sans poésie et où les angoisses des gens ne sont autorisées à s'exprimer que dans leurs rêves. C'est dans ce monde cruel que grandissent les deux héros, le blond et le brun, sortes de Starsky et Hutch de l'antiquité (j'avoue, dès qu'il y a un blond et un brun, je compare à Starsky et Hutch), aux caractères différents mais solides, qui vont leur permettre de traverser les épreuves solidairement.

Si le monde romain est habilement reproduit, Marini s'autorise pourtant une ... ce n'est pas un aigle, c'est un faucon !
... ce n'est pas un aigle, c'est un faucon !
révision du type de langage habituellement autorisé dans ce type de récit historique : ici, on n'hésite pas à se traiter de « connard » ou de « salope », ce qui peut déconcerter l'amateur de peplum old school. Pourtant, rien de plus logique : les dialogues d'origine étaient de toute façon en latin, et devaient contenir leur lot d'insanités, il est donc naturel de les retranscrire dans un langage équivalent. C'est le même procédé qu'utilise la série Kaamelott à des fins plus comiques (quoique, le livre V...) : moderniser les dialogues sans pour autant leur faire trahir le sens qu'ils avaient à l'époque.

Le dessin, bien entendu, ravira les amateurs du travail de Marini sur le Scorpion. La violence et le lyrisme se ramassent à la pelle sur les planches de l'album, et c'est avec une grosse envie de la suite qu'on arrive à la 56ème page, qui n'est suivie que d'un glossaire un peu superflu (le lecteur qui est en âge de parcourir des histoires de tortures et de lupanar est supposé avoir un minimum de connaissances sur les mythologies gréco-romaines - même s'il a été élevé par la télévision).
Donc voilà un volume que vous pouvez mettre dans vos courses de Noël, en vous assurant que personne d'autre n'y a pensé avant vous. Mais globalement vous pouvez être tranquille : tout le monde va s'entre-offrir les deux derniers albums de XIII les yeux fermés...