6/10Spider-man - 2007 - L'Empire

/ Critique - écrit par riffhifi, le 20/05/2008
Notre verdict : 6/10 - Le Reign est tombé dans la purée (Fiche technique)

Tags : man spider andrews comics marvel peter heros

Spider-man a droit lui aussi à sa version Dark Knight returns : vieux et fatigué, il va devoir se dresser contre le mal dans un monde auquel il n'appartient plus. Déjà vu ? Hélas oui. Dommage, car le rendu a pas mal de caractère.

Frank Miller, en 1987, décrassait l'image de Batman en lui donnant vingt ans de plus, de la bedaine, des rides et de l'arthrite. L'album s'intitulait The Dark Knight returns, et constituait une des plus belles pages de l'histoire du héros. Chef-d'œuvre séminal, il inspira aussi bien les collègues de Miller que le jeune Tim Burton pour son film de 1989. Mais le chef-d'œuvre, par essence, ne peut être dupliqué artificiellement : Frank Miller lui-même en a fait les frais en voulant donner une suite à l'histoire, le raté Dark Knight strikes again. Et malheureusement, Kaare Andrews se heurte à la même malédiction en transposant le principe dans le monde de Spider-man. Ce n'est pas un problème de compatibilité DC / Marvel, c'est une question de fraîcheur. L'auteur ne manque pas de talent, mais cherche trop à marcher dans les pas de son prédécesseur pour qu'on puisse lui accorder le crédit de l'originalité. La référence est officielle : la quatrième de couverture de l'édition originale titre : « Spider-man's darkest night ? »...

Nous sommes donc à quelques décennies de maintenant. Peter Parker n'a jamais fait fortune, il est devenu un petit vieux fauché portant le deuil de sa femme Mary-Jane. New York est désormais régie par l'Empire (the Reign), une milice violente qui n'aide pas vraiment les citoyens à s'épanouir. La ville est grise, glauque, menaçante. Mais J. Jonah Jameson va donner un coup de pied dans la fourmilière pour faire sortir l'Araignée...

On croyait connaître Pater par coeur
On croyait connaître
Peter par coeur
De la même manière que dans le Dark Knight returns de Miller, le personnage principal commence par apparaître comme un homme fini, hors-circuit. Quelques poils au menton (une moustache pour Bruce, une barbe pour Peter), une silhouette mal entretenue (bedaine, maigreur), un lien retrouvé avec une vieille connaissance (Gordon, Jameson), le super-héros ne semble pas prêt de se glisser à nouveau dans son costume de zouave pour sauver le monde. Le sauver de quoi, d'ailleurs ? Dans un cas comme dans l'autre, le monde est devenu froid, hostile, incompréhensible. Rien ne semble plus bon à sauver. Pourtant, l'instinct remonte à la surface. La bête a besoin d'un dernier combat, comme dans Rocky Balboa. Guidé par un besoin purement égoïste de retrouver sa jeunesse dans une poussée d'adrénaline électrisante, Peter repart sur la brèche. Le pouvoir du masque est le plus fort : une fois enfilé, le vieillard n'existe plus, il disparaît sous le casse-cou dispenseur de vannes. En face, les méchants ont pris quelques années aussi. Ils ont ramolli, certains sont des loques. Mais ils sont là pour aider le héros à reconstruire du sens. Parce qu'en fin de compte, l'espoir qu'il peut donner aux gens à travers ses actions n'est qu'un prétexte à reconstruire autour de lui l'environnement de ses 20 ans... Le scénario ménage peu d'idées vraiment nouvelles par rapport à son aîné, en-dehors de la terrible histoire qui entoure la mort de Mary-Jane, et le final, bien qu'impressionnant, est sans commune mesure avec l'affrontement dans lequel Batman se lançait désespérément. Quand à l'épilogue, il est à peu près le même.

La petite bête qui monte. Sur le dos des gens.
La petite bête qui monte. Sur le dos des gens.
Graphiquement aussi, le style fait furieusement penser à Miller, bien que les larges bandes verticales ou horizontales remplacent les petites cases carrées. Kaare Andrews, tenté de reprendre le principe des flashs d'actualité comme support de narration, parvient à se retenir de le faire trop souvent ; ouf. Quelques éclairs d'inspiration zèbrent l'album le temps de pages splendides ; mais globalement, la grisouille ambiante empêche les images trop contrastées, et pas mal de scènes paraissent sous-exploitées. On se rattrapera sur les couvertures des quatre tomes, cruelles et sanguinolentes.

Variation trop servile d'un classique, L'empire oublie de trouver un ton nouveau et de développer ses propres thèmes. Dommage, il y avait une volonté tangible de casser la baraque.