7.5/10La Quête de l'Oiseau du Temps : Cycle 2 - Tome 2 - Le grimoire des dieux

/ Critique - écrit par gyzmo, le 14/12/2007
Notre verdict : 7.5/10 - Spö ! (Fiche technique)

Comme s’ils étaient partis en quête d’un nouveau nid à idées, là-bas, vers un ailleurs inaccessible, ces drôles d’oiseaux de Loisel et Le Tendre ont mis une éternité à pondre une suite.

1987. Loisel et Le Tendre mettaient k.o. un lectorat impatient, abandonnant derrière eux les héros de La Quête de l’oiseau du Temps, premier cycle d’un souffle nouveau dans les voiles souvent sclérosées du genre heroic fantasy. Au terme des dernières pages, les démiurges avaient quelque peu rassuré leurs fidèles en supposant une suite à ce périple au dénouement dévastateur. Dix ans d’attente auront été nécessaires pour que la Quête reprenne. Mais loin de l’impasse dans laquelle elle s’était terminée. Par l’entremise des pinceaux de Ludwine, et toujours sous la plume des compères Loisel et Le Tendre, L’Ami Javin revenait pratiquement un demi-siècle avant que le vieux Chevalier Bragon ne sombre dans la folie. De cette préquelle inattendue et enchanteresse, un sacré coup de jeune fût donné à tout ce joli monde. Mais depuis 1998 – date de sortie du tome, plus de nouvelles. Jusqu’à ce que Le Grimoire des Dieux révèle enfin à son tour ses secrets…


Plus que le volume précédent, Le Grimoire des Dieux est une perle narratologique fourmillant d'explications. Tous les éclaircissements de son scénario apportent un regard nouveau sur des aspects jusqu'alors passés sous silence. Il faut reconnaître que les fortes personnalités de la Quête étaient bardées de mystères propices à titiller les interrogations. Et ceux qui, 20 ans auparavant, attendaient d’en savoir un peu plus sur le ka-tet du premier cycle seront aux anges. De nombreuses références réinjectent les illustres figures qui ont fait le succès de la Quête. Inutile de rentrer dans les détails, il serait dommage de gâcher l’ingéniosité scénaristique des auteurs à ce propos. Mais sachez qu’à coup sûr, et d’après les pistes semées par Loisel et Le Tendre, les volumes qui suivront ce Grimoire prévoient la présence de clins d’œil dont l’objectif ne se résumera pas à satisfaire l’appétit nostalgique du fidèle lecteur, mais plutôt, de charpenter un Akbar cohérent dans lequel tout à un sens. Ainsi, les intrigues soulevées lors du périple initial (telles que l’origine tendue des relations interpersonnelles) bénéficieront d’une exposition. Entre le principal passage à Vaguamare (et son interminable tournois de guerriers) et la péripétie à la fois effrayante et poétique de l’Ombrâge, l’on peut cependant regretter un léger manque d’originalité par rapport aux volumes précédents.


Esthétiquement, Le Grimoire des Dieux est également une bien belle réussite. Exit Ludwine, place à Mohamed Aouamri, adroit auteur de
Mortepierre. La transition graphique ne choquera pas les familiers de la Quête tant Aouamri a su caler sa patte sur celle de son prédécesseur, elle-même fortement habitée par le style Loisel. Malgré tout, à bien y regarder, Aouami parvient à glisser son empreinte à travers une représentation plus fouillée du monde d’Akbar. Sans doute sous la houlette du directeur artistique Loisel, le nouvel illustrateur ne se focalise plus que sur leurs personnages et leurs actions respectives. Au détour de plusieurs vignettes, le premier plan est offert à la figuration environnante, de l’habitant à la faune. L’objectif d’une telle attention n’est pas superficiel. Il permet non seulement de varier les atmosphères, mais également de mieux définir l’univers dans lequel évoluent les personnages. Ainsi, les us et coutumes d’Akbar deviennent palpables. Le monde imaginé par ses auteurs prend plus de consistance que d’ordinaire. Tout comme les choix des cadrages et le rythme sans temps mort, les couleurs chatoyantes hissent ce volume au-dessus de la pile.


Comme s’ils étaient partis en quête d’un nouveau nid à idées, là-bas, vers un ailleurs inaccessible, ces drôles d’oiseaux de Loisel et Le Tendre ont mis une éternité à pondre une suite. Un laps tout à fait colossal – peut-être même désespérant pour certains, qui sait ? – au terme duquel les merveilleuses trouvailles de Loisel et Le Tendre permettent aujourd’hui de combler n’importe quelle fringale. En tout cas, avec tout ce que contient Le Grimoire des Dieux, il y a largement de quoi faire patienter les gargantuas que nous sommes, en attendant La Piste du Rige, prochaine étape d’Avant la Quête.