8.5/10Manu

/ Critique - écrit par Maixent, le 18/06/2011
Notre verdict : 8.5/10 - Ingérable Manu le malin (Fiche technique)

Tags : manu dibango menu jazz bar diner musique

Un classique de la bande dessinée des années 80 que l'on retrouve avec plaisir, surtout que Manu n'a absolument pas vieilli et continue à faire rire tous les publics.

Au milieu des années 80, le personnage de Lucien est déjà connu des amateurs de bandes dessinées. C’est donc tout naturellement que l’on propose à l’auteur de le rendre d’autant plus vivant en le faisant passer à la télé. Mais Margerin préfère laisser Lucien et sa bande sur papier tout en étant séduit par le projet. Naîtra alors Manu, pensé dès le départ comme un personnage d’animation, mais qui existera aussi sous forme de planches. Graphiquement très proche de Lucien duquel il se différencie seulement par son nez pointu et sa longue mèche jaune, Manu est âgé d’une quinzaine d’années et est surtout beaucoup plus gaffeur et insupportable que ce rocker sympathique et bonhomme de Lucien. En effet, Manu ce serait plus Quick & Flupke version perfecto en cuir et converses, toujours prêt à faire conneries sur conneries sans rien assumer ni se remettre en question et faisant tout retomber sur son pote Robert. Issues du format télé, les planches
Sur l'autoroute des vacances
sont courtes, rarement plus de deux pages, si ce n’est dans le troisième tome qui au lieu de présenter des gags mettant en scène Manu et Robert, propose des histoires plus longues où l’on retrouve Manu et sa petite famille. On voit ainsi que Manu prend de la matière au fur et à mesure, n’offrant que des anecdotes pour ados au départ, il acquiert petit à petit un univers qui lui est propre, ne se contentant plus d’être un alter ego de Lucien plus jeune.

Comme à son habitude, Manu met en avant le rock et Malakoff, symbole de la vie de banlieue ouvrière et prolo mais sans le côté barres d’immeubles, offrant un
Les joies des concerts punks
panorama de la jeunesse française des années 80, avec une multitude de
personnages à gros nez et de longs dialogues rythmés. Nos héros, spécialistes des plans foireux qu’affectionne Margerin se trouvent embrigadés dans des situations assez simplistes et quotidiennes qui finissent le plus souvent en eau de boudin pour le plus grand plaisir des lecteurs. La recette appliquée ici est toujours aussi efficace et même si Manu s’adresse à un public plus jeune, il ravira tous les publics. En effet, Margerin base chacune de ses histoires sur un thème bien
précis (la chasse, le ski, le dentiste…) et brode sur ce thème en y confrontant ses personnages qui finissent invariablement par déraper. Au passage, il tacle un peu les travers de la société comme ces flics qui dressent un procès-verbal à Manu tandis qu’en arrière-plan, d’autres crimes plus graves sont commis. Curieusement, à part
Tapez! Dans le ballon! Tapez! Sur le voisin!

certains petits détails (comme programmer son magnétoscope pour enregistrer un match), ça n’a pas du tout vieilli et l’on retrouve des problématiques et des situations toujours d’actualité. Trente ans après, un ado de quinze trouvera toujours ses parents ringards même s’ils le sont autrement, et portera un jugement différent sur la société, à la fois moqueur et critique.
Malgré son côté insupportable, Manu est bien loin d’un Eric Cartman et reste rigolard et sympathique. C’est seulement un petit con gaffeur spécialiste des faux plans et souvent de mauvaise foi. Tous les personnages sont d’ailleurs attachants chacun à leur manière, l’auteur leur insufflant juste ce qu’il faut de caractère pour les rendre vivants.
Au final, même si c’est un livre pouvant séduire les enfants, il est surtout, selon la formule consacrée, adapté de 7 à 77 ans. Même si Lucien reste le grand héros de Margerin et sans doute le plus abouti, Manu n’est pas à négliger pour autant et présente un réel intérêt.
Cette édition présente en bonus quelques croquis de Margerin ainsi que des annotations pour diriger l’équipe du dessin animé qui mettent en valeur son côté perfectionniste et présente la réalité du travail.