9/10Lorna

/ Critique - écrit par Maixent, le 10/10/2012
Notre verdict : 9/10 - BDBis (Fiche technique)

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Depuis quelques années se développe un engouement de plus en plus assumé pour le cinéma bis en général. Ceux qui étaient les exclus de l’époque, les lunetteux passionnés comme Jean-Pierre Dionnet, considérés comme les Geeks des années 80 ont maintenant leurs lettres de noblesse et ont su transmettre leur passion aux jeunes générations, dénichant des perles de kitsch et réussissant ce tour de force qu’est détourner la notion même de Chef d’œuvre.  En effet, tous ces Nanars sont maintenant des références, il n’y a qu’à voir à quelle vitesse partent les places pour la Nuit Excentrique proposée une fois l’an par le site nanarland.com, et ont pris part à l’inconscient collectif au même titre que des références plus admises et classiques.


Une femme en ville
Brüno semble faire partie de cette mouvance. Lorna n’est pas une parodie, ni même un hommage. C’est l’assimilation d’une culture que ce trentenaire a su réinventer et transcender. Bien sûr on y reconnaîtra des personnages que l’on connait déjà et une trame narrative reconnaissable mais sans jamais avoir l’impression que l’auteur face un copier/coller de ses influences. Les références sont nombreuses et on reconnaîtra La Mouche ou la Femme de 50 pieds, mais plus subtilement toute une partie du cinéma américain des années 70, du road-movie  à la science-fiction en passant par un porno rappelant les heures glorieuses de Gorge Profonde.

Pour ce qui est du dessin, l’utilisation de la bichromie est parfaitement maîtrisée, conférant à l’ensemble une réelle cohérence et un style  à la fois vieillot, rappelant une époque où l’utilisation de la bichromie était surtout une absence de choix et moderne dans le choix volontaire de cette technique que l’on retrouve régulièrement chez les jeunes auteurs en quête d’authenticité, comme on pu le voir par exemple dans Sophia libère Paris de Capucine et Libon, ne cherchant pas à produire un dessin tape à l’œil et graphiquement facile.  Qui plus est,
Rupture
le style faussement enfantin, tout en gardant un certain réalisme permet certains débordements dans l’horreur ou la sexualité sans pour autant que cela devienne graveleux ou complaisant. Il y a un côté « bricolage », comme dans les films à petit budget mais traités avec un savoir-faire et un talent qui font sortir l’album du lot. On pensera par exemple à Bad Taste, le premier film de Peter Jackson, réalisé le week-end par une bande de copains pour un budget à minima mais réunissant tous les critères d’un bon film du genre.


Transformation
L’histoire rajoute un aspect comique et absurde avec un décalage permanent, le savant fou s’appelle Machin, l’extraterrestre est une sorte de pingouin et le combat final ressemble à un vieux Power Rangers dans des décors en carton. Henri Luxe-Butol est un chercheur sous le joug d’un père autoritaire et manipulateur proche d’un Lionel Luthor dans la série Smallville. Prêt à tout pour impressionner ce dernier, Henri vole sans vergogne le produit miracle de son collaborateur, William Machin, le Priaps, qui, comme son nom l’indique sert à soigner l’impuissance, voire un peu plus. Vengeur, Machin inocule alors à Henri de l’ADN de Tarentule modifiée qui ne donne pas de supers pouvoirs mais transforme Henri en une bête hideuse. Pendant ce temps-là, Tamara, la copine d’Henri le quitte et continue sa carrière florissante d’actrice porno tandis qu’une femme géante qui est en fait un vaisseau extraterrestre piloté par un pingouin débarque sur terre.

Un très bel ouvrage maîtrisé de bout en bout avec des réelles qualités graphiques, un humour sensible et surtout l’assimilation d’une contre-culture à laquelle l’auteur a su redonner ses lettres de noblesse. Reste une question en suspens et un point qui a dû m’échapper… Qui est Lorna ?