7/10Cabu : reporter-dessinateur - Tome 2 - Les années 80

/ Critique - écrit par Amiral, le 03/11/2008
Notre verdict : 7/10 - Club Mitterrand (Fiche technique)

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Et voilà ! Après un premier tome présentant les joies et déboires de notre société durant les 70's, Cabu dépoussière enfin le coffre renfermant ses vestiges graphiques des années 80.

Et voilà ! Après  un premier tome présentant les joies et déboires de notre société durant les 70's, Cabu dépoussière enfin le coffre renfermant ses vestiges graphiques des années 80. Au menu de ce recueil : divers sujets où l'auteur friand a pu graver de son trait sec les fredaines des politiciens majeurs de l'époque, sans compter les têtes d'affiches drôles ou pathétiques. La vedette de ce tome 2 ? Sans aucun doute « Tonton » Mitterrand et sa cour de canards boiteux. Chirac, Fabius, Rocard, Marchais, le Général Bigeard... Tous passent sous la plume tranchante de ce journaliste-dessinateur. Mais les années 80 sont marquées aussi par le scandale du Rainbow Warrior, l'émergence des radios libres, l'insouciance d'une jeunesse bercée par Dorothée, tandis que les prostituées sont consommées comme des fast-foods et que le Paris-Dakar maquille déjà la pauvreté en Afrique par son image commerciale... Les événements ne manquent pas pour inspirer l'artiste malgré lui, en cette fin de Guerre Froide.

Cabu observe, prend des notes, s'amuse ou se révolte au fur et à mesure que se dessinent ses cases. L'homme n'est pas dénué de créativité. Alterner le Canard Enchaîné et Charlie Hebdo a stimulé son exercice de style : « Le Canard est un journal de journaliste qui accueille des dessinateurs, alors que Charlie est un journal de dessinateur qui accueille des journalistes ». Pochette et crayons en guise de bloc note et d'appareil photo, Cabu dessine, ne se contentant jamais de la simple casquette de reporter. Il vit l'instant sans être dépourvu d'ironisme par rapport à la nature humaine. Révolté ou amusé, la neutralité de cet opus demeure encore inexistante. Mais peut-on vraiment reprocher à un journaliste ses prises de positions au risque d'être accusé de dénigrer l'information ? Pas forcément. Même si l'auteur se revendique comme un homme de gauche et ne lésine pas à caricaturer les têtes avides de pouvoirs tout en légitimant excessivement son point de vue, son écriture éveille les consciences lorsqu'il est envoyé sur place pour couvrir un événement. Qu'elles amusent ou offusquent, les contres-positions suscitent la réaction du lecteur. Vaut-il mieux un journaliste séditieux ou un rapporteur de dépêche AFP dont la teneur des propos est non substantielle ? Chacun aura son avis sur la question.

A travers ses annotations, Cabu nous confesse plus que ses prises de position. Il dépoussière l'atmosphère spontanée jadis palpable... A la fois maladroite, candide et insouciante, où la cruauté des hommes n'avait d'égale que la chaleur solidaire. Ainsi, le recueil est un petit fragment de papier qui vous met face au conditionnement rigide de notre temps. A défaut de vous y apporter des réponses, l'ouvrage a le mérite d'entretenir les interrogations pertinentes. Les années 80 de Cabu semblent si loin lorsque nous parcourons les pages, alors que la porte vient à peine de se refermer derrière nous. Mais quelles leçons avons-nous tiré de notre folle jeunesse ?