Absolution - Tome 1
Bande Dessinée / Critique - écrit par Maixent, le 11/09/2012 (Tags : absolution tome comics livre heros etat couverture
John Dusk doute.
Après huit ans de bons et loyaux services en tant que super héros, il est arrivé à saturation. Trop de violence et d’horreurs, des cauchemars qui n’en finissent pas, trop peu de reconnaissance. Comme Rorschach des Watchmen il y a eu l’affaire de trop, l’ignominie que l’on ne peut plus assimiler, l’échec de la résilience et une seule envie qui monte à la gorge, qui l’étouffe tout en le faisant vivre à nouveau, la vengeance. Arrêter les circonvolutions étatiques et toutes les lenteurs administratives pour enfin jouer avec les mêmes armes. Un super-vilain n’a pas de limites, pourquoi un super-héros devrait en avoir alors qu’il possède le pouvoir et peut aisément se substituer à une loi déclinante ?
Sur ce postulat se décline une bande dessinée profonde dont on attend avec imatience
Dans sa bulle le deuxième et dernier tome. Le thème n’est pas nouveau et on avait déjà Judge Dredd dès la fin des années 70 à la fois juge et bourreau dans une société dystopique où les Juges ont tout pouvoir pour faire appliquer la loi. Ici, on est bien loin de l’interprétation de Stallone dans l’adaptation cinématographique du comic qui beuglait « La loi c’est moi », mais dans une vision plus subtile. On évite cette dichotomie entre le bien et le mal que l’on trouve dans la plupart des comics. Le héros doute, le héros tue, mais tous les autres personnages autour de lui (ou presque) le soutiennent, même s’ils sont conscients de la limite entre le dicible et le passage à l’acte.
En effet, depuis que John Dusk, avec sa force létale sorte d’ectoplasme auquel il peut donner la forme qu’il veut, capable de trancher un bras avec plus d’efficacité qu’un sabre dans Kill Bill, a décidé d’intervenir à sa façon, le monde est devenu meilleur même s’il a outrepassé les limites et qu'il est devenu un monstre. Se pose la question de la violence, des châtiments nécessaires et de la réaction humaine et juste face à l’inhumain. Cela commence par « non-assistance à personne en danger », en laissant un violeur nazi capable de soulever un tank se vider de son sang sans lui prêter secours. Pour John c’est le début de la fin. L’engrenage est
Cauchemarslancé et il lui est impossible de reculer. De plus, lui vient le goût du sang, cette soif inextinguible qui le rapproche toujours un peu plus de ce qu’il hait.
Au-delà de cette ligne rouge sang qui sert de fil conducteur au récit, on peut repérer quelques trouvailles intéressantes, notamment dans le choix des super pouvoirs. Difficile d’être original depuis l’avènement des X-Men et leurs capacités sans limites mais les auteurs réussissent à se démarquer. Nous trouverons donc un homme capable de séparer chaque élément de son corps et de les mouvoir séparément pour s’en servir comme arme ou encore un autre, génial inventeur mais dont les inventions improbables ne fonctionnent qu’en sa présence. On trouvera bien sûr des éléments plus classiques comme une force surhumaine ou des pouvoirs télékinétiques.
Le dessin, quant à lui, est efficace sans être exceptionnel. Très proche de la ligne déliée des comics, parfois même légèrement enfantin avec une ligne claire mettant d’autant plus en avant le caractère violent de la bande dessinée dans son ensemble.
Changement de campLa fluidité est d’autant plus rendue dans le dessin grâce aux pouvoirs du héros, sa force létale, de couleur bleue, remplissant la surface de la case, lui conférant une certaine dynamique à laquelle répond celle du sang et des longues trainées qui dégoulinent sur les pages. Le tout est sans doute trop lissé et photoshopé, d’où un manque de personnalité mais on peut passer outre.
Les auteurs réussissent donc à renouveler un peu le genre, ce qui n’est pas chose facile, en apportant un questionnement sans aucun doute intéressant et amenant à une réflexion plus poussée que ce que l’on peut voir dans les ouvrages du même type. L’histoire est prenante, les personnages attachants et profonds avec une réelle parcelle d’humanité. Le thème du super héros déviant n’est pas nouveau mais il est ici traité honorablement dans un comics sans concession avec un style direct et efficace.
En bonus, une fiche détaillée de chaque personnage et de très belles couvertures panoramiques de l’édition originale par Juan Jose Ryp que l’on connaissait déjà notamment pour Jeux de Filles.