Petite nature - Interview de Jean-Christophe Chauzy - 02/04/2008

/ Interview - écrit par riffhifi, le 02/04/2008

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Interview de Jean-Christophe Chauzy pour la sortie de son album Petite nature - Tome 2 - Même pas peur chez Fluide Glacial.

A l'occasion de la sortie du deuxième tome de Petite nature chez Fluide Glacial, Jean-Christophe Chauzy a accepté qu'on lui pose des questions. Il a même accepté d'y répondre, béni soit-il.

D'après le dossier de presse, vous avez 44 ans et vous mesurez 3m80. Faut-il en conclure qu'à 22 ans vous mesuriez 1m90 ?
A 22 ans, je mesurais déjà 1.97 m ; ce qui était déjà pas si mal.

Comment s'est passée la transition entre Casterman et Fluide Glacial ? Avez-vous l'impression de travailler différemment quand vous passez d'un éditeur à l'autre ?
On devait rééditer Parano, épuisé depuis un certain temps, et j'avais à cet effet commencé à écrire de nouvelles histoires. Puis Casterman s'est aperçu que réimprimer l'album serait impossible sans numériser toutes les pages, ce qui aurait plombé le budget d'exploitation du livre. Tinlot, de Fluide, passait par là, est tombé sur mes projets d'histoire et m'a proposé de rejoindre l'équipe de Fluide. Je n'ai pas hésité longtemps. L'idée du journal, la possibilité de voir plus souvent des potes ou des dieux vivants a emporté le morceau. Moyennant quoi Parano n'est toujours pas réédité.
Jean-Christophe Chauzy
Jean-Christophe Chauzy
On travaille différemment pour Fluide puisque l'idée est d'être drôle, ce qui n'est pas forcément dans mes habitudes mais collait parfaitement avec le projet « petite nature ». Et puis j'ai le grand plaisir de travailler de nouveau sur des histoires courtes, plus toniques, plus stimulantes graphiquement. En passant à Fluide, j'ai l'impression d'aborder une autre phase de ma « carrière ».

Vous êtes content d'être publié dans un album grand et mou plutôt que petit et dur ?
Je suis moi-même plutôt grand et mou, il y a une sorte de logique.

Après Lindingre et Zep, vous coécrivez ce deuxième album avec Lindingre et Anne Barrois. Vous n'en avez pas marre de Lindingre ?
Bah, il faut bien l'aider à payer ses bières, et puis il est devenu père de famille. Je n'ai pas eu le courage de le congédier. Et enfin, il est devenu indispensable à Fluide depuis ses ventes phénoménales dans la région de Charleroi avec Titine à Charleroi.

Comment travaillez-vous avec des scénaristes sur ce personnage qui est... vous ? Est-ce que vous en profitez pour prendre du recul sur vous-même, ou au contraire pour éloigner votre alter ego de ce que vous êtes réellement ?
Les deux, monseigneur. Si je racontais véritablement ma vie, ce serait terriblement emmerdant. La conception des histoires nécessite un grand effort d'articulation de péripéties ou d'enchaînement pathétiques pour provoquer l'effet comique. La réalité seule ne suffit pas. Cela étant, je suis l'auteur des histoires les plus autobiographiques, tandis que j'attends de Yan et de Anne qu'ils imaginent des situation auxquelles je n'aurais jamais pensé. Ces situations utilisent bien sûr les caractéristiques du personnage posées préalablement mais permettent d'en découvrir de nouvelle facettes, de le confronter à des humiliations inattendues.

Dans Père courage, un de vos enfants propose de regarder La nuit des morts vivants, mais il brandit un DVD de Zombie. Vous êtes conscient que ce n'est pas le même film ? Avez-vous vu les deux malgré votre petite nature ?
Oui, oui, mais le titre Zombie parle moins à l'inconscient collectif que « La nuit des morts vivants » tandis qu'il est plus facile à dessiner dans le format réduit que j'avais à ma disposition. Et puis on peut imaginer que non content d'être lâche, ce cher Jean-Christophe n'est pas très rangeur et mélange les CD dans des boîtiers différents (ah, l'argument à deux balles !).

Etes-vous capable nerveusement de faire un tour en grand huit ? Et surtout, êtes-vous capable de manger un truc sucré et gras juste après avoir fait un tour de grand huit ?
J'ai décidé de ne plus monter dans ces instruments de torture, mais mes enfants rivalisent d'ingéniosité pour me convaincre de les suivre. Je suis persuadé systématiquement d'y perdre la vie et me promets que plus jamais ça. Quant aux nourritures évoquées, n'en parlons même pas.

Dans Diffamafion, une famille d'actionnaires vous reproche d'avoir mis leur fils crétin dans une de vos planches. Est-ce que ce genre de mésaventure vous est déjà arrivée en vrai, comme Binet avec son couple de Bidochon qui l'avaient accusé de s'être inspiré d'eux ?
Pour ma part, je n'ai pas encore vraiment connu ce genre d'incident (encore que je me serve de personnages réels sans toujours demander leur avis -Des noms ! des noms ! ah non !-). En revanche, cette histoire est très savoureuse puisqu'elle a été écrite par Yan, qui a subi un licenciement sec de la part de son employeur lorsque certains de ses supérieurs hiérarchiques se sont reconnus dans les aventures de Titine dans le milieu de l'art contemporain [voir notre article à ce sujet]. A voir sans doute comme une petite vengeance par procuration...

Quand vous sortez avec des amis et que vous devez décider dans quel restaurant aller, vous est-il souvent arrivé qu'on vous dise : « C'est toi qui Chauzy ! » ?
Ah Ah !

Si vous aviez un disque, un livre, un film et une bande dessinée à recommander en ce moment, quels seraient-ils ?
Midnight boom, des Kills, ou le live à Liverpool de Gossip, pour la musique qui donne envie d'être en vie. Planète terreur de Rodriguez, depuis peu en DVD pour le cinéma qui fait rire, We own the night de Gray et Les promesses de l'ombre de Cronenberg pour le cinéma qui fait du bien au cerveau. Et puis tous les bouquins de Chris Ware, ceux de Daniel Clowes, la réédition de Krazy Kat de Herriman par Fantagraphics, Black hole de Burns ou le De Gaulle à la plage de Ferri pour les histoires en images.

Quelle est la bande dessinée dont vous êtes le plus fier dans votre carrière à ce jour ? Y a-t-il des envies que vous n'avez pas encore assouvies ?
La vie de ma mère est l'album (face A et face B, en fait, donc deux tomes) dont je suis le plus fier parce qu'il est le plus signifiant et parce qu'il était le plus difficile à faire. J'y suis arrivé comme j'ai pu, mais je le crois émouvant et dur.
Sinon, j'ai des petites faiblesses pour des bouquins qui me paraissent aussi réussis que possibles, comme Parano, Béton armé, Rouge est ma couleur ou encore Petite nature, parce que j'y prends un plaisir immense.

Du coup, dernière question logique : quels sont vos projets actuels ? Petite nature 3, mais encore ?...
Et bien en effet un Petite nature 3, en espérant qu'il y en aura d'autres, ce qui dépend directement de nos chers lecteurs. Et puis une nouvelle histoire avec Marc Villard, dans le cadre de la nouvelle collection Rivages/Casterman, La guitare de Bo Diddley.
Merci beaucoup pour votre attention, les amis.

 

Krinein distribue sa reconnaissance par larges poignées à Jean-Christophe Chauzy et à Christine Leriche.