Irrécupérable - Tome 1 - Sans Retour
Bande Dessinée / Critique - écrit par Canette Ultra, le 11/06/2010 (Tags : irrecuperable heros comics tome sans retour delcourt
Quand Waid et Krause permettent au plus grand héros de la Terre de transformer cette dernière en champ de ruines, cela donne un album fort sympathique et intelligent. Comment un super-héros peut se lasser d'aider les gens. L'insensibilité physique accroît-elle la sensibilité du coeur ?
Irrécupérable est un album signé Waid et Krause. Les deux hommes ne sont pas des débutants et ils se sont déjà illustrés dans des séries tels que Superman ou Hunter Killer (pour Waid). Le monde des comics est donc connu et archi-connu des deux hommes. Ils connaissent bien les super-héros, leur monde, leurs pouvoirs mais aussi leurs petits secrets. En effet, depuis maintenant près de trente ans, les hommes et les femmes qui défendent notre planète ne sont pas aussi parfaits et lisses que par le passé. Des artistes comme Moore (Watchmen) ou encore Miller (Batman, Daredevil) se sont attachés à nous montrer la face cachée des héros. Plus récemment, Kick Ass nous montrait de façon plus humoristique la noirceur du monde des super-héros. L'image du gentil héros au sourire ultra bright qui sauve les chatons en détresse des vilains habillés en fluo est révolue. Maintenant, les héros sont des dépressifs, des utopistes ou de profonds tordus qui se lancent dans une guerre contre l'injustice de gangs sadiques et surarmés.
Fallait pas l'énerver ! La réflexion d'Irrécupérable va même au-delà de ces questions. Waid nous pose la question suivante : « et si le plus grand héros de la Terre devenait le mal incarné ? » . Comme si Superman grillait Métropolis ou comme si Batman rayait Gotham City de la carte. Ce genre de thème a parfois été approché dans des What If ou des univers parallèles mais pas jusqu'à ce point. Waid nous propose donc un héros plus tourmenté, qui semble être devenu las des plaintes des humains et qui massacre à tours de bras. Parfois un plan semble apparaître mais la nature profondément sadique de son « héros » reprend vite le dessus. Fou, manipulateur ou bien les deux, on ne sait pas vraiment sur quel pied danser avec le Plutonien. Déçu ou visionnaire, ce premier tome pose des questions intéressantes.
Action, réactions ! De plus, ces réflexions sont portées par des scènes d'action ou des flashbacks grandioses. Krause dessine avec intelligence les protagonistes. Les émotions sont subtiles et les enchaînements bien sentis. Le groupe du Paradigme notamment est charismatique autant qu'intéressant.
Le Frelon est piqué au vif ! Dans ce tome, nous découvrons le Plutonien, un super héros proche de Superman au niveau des pouvoirs. Il est sympa, aimable toujours prêt à aider les gens et ses amis du Paradigme (sorte de Justice League ou de Vengeurs ) le considère comme un parangon de justice et de bien jusqu'au jour où il rase la ville de Sky City et massacre ses anciens alliés. Il atomise le Frelon et sa famille, détruit le bras de Volt venu discuter avec lui ou lobotomise son ancien sidekick. Devant la folie du héros, les survivants du Paradigme s'associent sous les ordres de Qubic (sorte de Mr. Fantastic pour l'intelligence) pour découvrir les raisons derrière ce changement d'attitude mais également les moyens de l'arrêter. Il apparaît au fil du récit que les causes sont profondes. Trahison, déception, lassitude sont autant de pistes et d'indices qui plongeront le groupe dans une course contre la montre pour stopper leur ancien partenaire. On devine que ce dernier a un plan car il pourrait tous les détruire dès leur première rencontre. Mais le Plutonien semble suivre d'autres desseins. Certaines ficelles apparaissent donc mais elles conservent toutefois une part d'ombre comme la relation entre le Plutonien et Bette Noire.
Irrécupérable est donc un album dans la veine des comics les plus sombres sur le super-héroïsme. Violent mais jamais excessif, intelligent mais jamais soporifique, cet album donne envie de connaître la suite. Certains trouveront peut-être le dessin classique mais ce serait passer à côté du second degré et de la subtilité qui se dégage des planches de Krause. Irrécupérable porte haut les couleurs des comics inspirés et habiles. Ce comics a d'ailleurs reçu trois Eisner Awards (les Oscar du comics) dont celui de meilleure nouvelle série.