Les Cœurs boudinés - Tome 1 - Cinq histoires sucrées-salées de femmes (et d'hommes) à croquer
Bande Dessinée / Critique - écrit par iscarioth, le 17/05/2005 (Les Coeurs Boudinés aborde le sujet de l'obésité en ayant l'intelligence de ne pas apitoyer le lecteur. On croirait presque à de l'humour noir... A découvrir !
On se souvient de la bande dessinée Maigrir de Fredman et Jim, publiée à l'époque où les BD à thèmes pullulaient. Il y avait dans cet album un gag plutôt cruel mais terriblement vrai. Il s'agissait d'un jeune homme très romantique qui, le soir venu, près d'un feu, sous une nuit étoilée, partait à la conquête de l'entrejambe d'une compagne particulièrement bien en chair. Le lendemain matin, cruel retour à la réalité, le jeune homme, devant un ami, s'esclaffait : « Oha j'ai bouffé du cul, c'te nuit, je me suis goinfré tu peux pas imaginer [...] Allez après j'file l'appeler, faut que je la lourde. Manquerait plus qu'elle se ventouse la mère dodue ». C'est tellement vrai ! Qui n'a pas connu ces fameuses soirées où, la gente masculine, après s'être pris un bon millier de râteaux auprès des 90-60-90, se rue en masse sur les 120-120-120 ?
Un râteau auprès des 90-60-90...Les Coeurs boudinés, c'est ça : ces « petites grosses » que les godelureaux sans pitié draguent pour rire, pour un soir ou pour approcher des copines mieux foutues. A partir de ce concept, on peut s'imaginer une bande dessinée très manichéenne, avec beaucoup de pathos. Une bande dessinée dans laquelle les rondes sont de pauvres victimes et les hommes de parfaits salauds... Et bien, pas tout à fait. Certes, les cinq histoires des Coeurs Boudinés ridiculisent à loisir les dragueurs de terrasse, les femmes sont soit des rondes, soit de parfaits mannequins, à croire qu'il n'y a pas de « juste milieu », si je puis me permettre l'expression. Mais, les « petites grosses » des Coeurs Boudinés ne digèrent pas naïvement les râteaux et moqueries en pleurnichant... Elles contre-attaquent ! Les jeunes filles ne sont jamais dupes, elles connaissent parfaitement les arrière-pensées des hommes qui les abordent avec « leurs gros sabots » et ont, semble-t-il, depuis très longtemps cessé d'espérer. On assiste d'ailleurs à quelques vengeances très osées ! Sexy Girl, la deuxième histoire, allie force burlesque et noirceur nonsensique. Grosse Pomme et Sandy insistent sur les « à cotés » : ces amies qui n'acceptent pas leurs « petites grosses » de copines et qui multiplient les réflexions pour les pousser à changer. On a aussi Viking veut, Viking prend, premier récit bourré de détails, qui ridiculise complètement l'univers des publicitaires. Quant on sait que Jean-Paul Krassinsky a longtemps travaillé pour des agences de publicité, cela prête à sourire.
...Et le retour forcé aux 120-120-120...Soulignons le très bon travail de Claire Champion, qui, contrairement à certains autres coloristes, ne fait pas du « remplissage » mais confère à l'album de véritables atmosphères. Chaque récit possède sa couleur dominante : bleu pour Viking veut, viking prend, rose pour Sexy Girl, vert pour Grosse Pomme, jaune pour Luigi et enfin orange pour Sandy.
Les Coeurs Boudinés aborde le sujet de l'obésité en ayant l'intelligence de ne pas apitoyer le lecteur. On croirait presque à de l'humour noir... A découvrir !