Comix Remix - Tome 1 - Feu Mister Mercure
Bande Dessinée / Critique - écrit par iscarioth, le 01/06/2005 (Tags : eur comix bourhis herve remix mister heros
Comix Remix, ce n'est pas simplement drôle, c'est aussi intelligent, sombre et angoissant. Mais l'album, avec sa structure peu claire, pas très fluide, son dessin très déjà-vu, ne parvient pas réellement à scotcher le lecteur. Dommage.
L'Histoire
Les super-héros de Towerville utilisent leur image à des fins mercantiles. Ils s'organisent autour de la toute puissante Corporation, qui contrôle et encaisse 50% des bénéfices. Certains super héros font de la résistance en formant une faction dissidente : Les Clandestins. Les événements s'emboîtent et l'histoire s'accélère lorsque vient à mourir le plus populaire des super héros : Mister Mercure.
A la découverte du synopsis et au feuilletage, Comix Remix donne l'impression d'être une parodie des comic books de super héros. Quand on se lance dans la lecture de cet album, on découvre une oeuvre autrement plus épaisse, dont le contenu ne peut se limiter à l'appellation de pastiche ou de satire.
Regardons derrière nous. En matière de bande dessinée, les européens n'ont jamais véritablement repris à leur compte les récits héroïques qui ont fait l'importance de la production illustrée américaine pendant des décennies. Quand la BD franco-belge met en scène des super héros à cape et à masque, c'est souvent pour en rire (Captain Biceps de Zep et Tébo). Dans cette optique, Comix Remix est assez novateur. Bourhis ne construit pas là une accumulation de sketchs parodiques mais une réelle histoire. Avec ce tome premier, il met en place un univers et un ensemble de personnages. Ainsi, les clins d'oeil au genre ne manquent pas, avec un ton très humoristique, des passages burlesques et satiriques, mais le récit génère aussi une certaine noirceur. Ce premier tome de Comix Remix présente un monde en proie à des luttes de pouvoir, des manipulations et malversations. L'humour se fait grinçant... « Mêlant de nombreuses influences, l'auteur signe en fait le premier comics de polar politiques à l'humour franco-belge » lit-on dans Canal BD. C'est à la découverte de cette noirceur-là que l'on écarte totalement une référence comme les Indestructibles, qui n'atteint pas du tout les mêmes thèmes en s'attaquant au mythe des super héros. A la limite, si l'on veut trouver des comparaisons, il est encore plus judicieux de faire référence à Watchmen, qui touche lui aussi avec noirceur à la starification des justiciers.
Hervé Bourhis, révélé par Thomas ou le retour du Tabou, récompensé par le prix Goscinny en 2003, nous propose une oeuvre qui ne manque pas de qualités, mais qui présente aussi plusieurs défauts, notamment structurels. Bourhis ne maîtrise pas totalement les scènes d'action, celles-ci ne sont pas très fluides, manquent de clarté. Le lecteur s'en retrouve gêné, parfois même ralenti.
Plusieurs personnages attirent l'attention et méritent d'être développés dans les tomes à venir : le très impressionnant et amusant Epaminondas, Felipe, John-John Mercure... Feu Mister Mercure, album d'introduction, présente une nébuleuse de personnages. Difficile, dans les quelques premières dizaines de pages, de s'y retrouver, même si, à la fin de l'album, on n'est pas totalement largué.
Le dessin de Bourhis, simplifié à l'extrême mais très nerveux et griffonné, est dans l'air du temps. Bourhis renvoie à tous ces auteurs de la « nouvelle vague » comme Dupuy et Berberian, Mardon, Blain, Larcenet... Sans toutefois atteindre leur degré d'organisation et de construction.
Comix Remix, ce n'est pas simplement drôle, c'est aussi intelligent, sombre et angoissant. Mais l'album, avec sa structure peu claire, pas très fluide, son dessin très déjà-vu, ne parvient pas réellement à scotcher le lecteur. Dommage.