Blaise - Opus 2
Bande Dessinée / Critique - écrit par athanagor, le 16/10/2010 (Tags : blaise planchon dimitri tome opus glenat livres
Ce deuxième tome des aventures philosophiques et collées d'un jeune homme qui évolue dans un monde compliqué reste, malgré quelques déceptions, une somme de bons moments.
Arborant toujours une gueule infernalement improbable, Blaise est aujourd'hui un ado bedonnant, que les fringues et la repartie classent automatiquement dans la catégorie des losers. Evoluant dans un monde en prise avec la montée d'un pouvoir fascisant, lui et sa famille continuent de se perdre dans leurs contradictions, auxquelles vient s'ajouter une savoureuse hypocrisie.
Il aura suffit d'un seul tome pour que le lecteur s'habitue au petit Blaise et le retrouve ici comme une vieille connaissance. Hormis l'aspect éminemment sympathique que cela suppose, cela comporte néanmoins des mauvais points. Ainsi, on constate que l'esprit général est désormais bien connu par le lecteur et fait moins souvent mouche. Planchon semble beaucoup moins inspiré pour ses personnages annexes, et les aventures télévisées de
l'inspecteur Strauss épuisent vite. Restent pourtant quelques passages d'une grande classe intellectuelle et d'un comique imparable, comme les épisodes en double page concernant les habitudes télévisuelles de tonton Hector.
Pour les bons points, on commence à décoder la façon dont Planchon bricole ses collages et à se rendre compte d'une véritable maîtrise, car d'une case à l'autre, bien souvent, seuls les sourcils sont modifiés et pourtant toute l'interprétation de l'image change. Cet effet est aussi fonction du texte, pour lequel Planchon manifeste là aussi un certain talent.
La familiarité avec le tome 1 permet également de constater que l'ambiance générale a été modifiée. Les absurdités qui y présidaient alors étaient comprises comme celles issues du regard d'un enfant face à un monde compliqué. Ici, l'absurde est la règle et le quotidien de tous les personnages ; installant à nouveau tout son discours dans un monde exagéré, mais perçu comme objectif, Planchon caricature tous ses paramètres et leur donne un peu plus de poids. Par exemple, le contexte politique est ici parfaitement identifié, malgré l'exagération dont il est victime et qui fera rire même le lecteur qui vote à droite, à ses zygomatiques défendant. Idem pour les habitudes sociales, les comportements des adultes et des ados, et la bêtise des programmes télé (quoique là...). En exagérant tout, Planchon facilite l'observation des traits qu'il grossit, et parvient à faire rire avec des sujets qui, sans le ridicule de la déformation, seraient glaçants.
A travers ces apparences moches et grossières, le caractère poussif de certaines planches et malgré l'échec comique de certaines autres, Planchon se révèle être un caricaturiste de talent, discipline pour laquelle il en faut une sacrée dose, et normalement assez pour un tome 3.