Blaise - Opus 1
Bande Dessinée / Critique - écrit par athanagor, le 02/02/2009 (Tags : blaise planchon dimitri tome opus humour parents
Second recueil des oeuvres de Dimitri Planchon après Jésus et les copains, Blaise profite également de cet atout rire que sont les collages de l'auteur.
Dimitri Planchon livrait déjà en 2005 Jésus et les copains, recueil des sketches sous forme de roman-photo, parus dans Fluide Glacial, retraçant les difficultés d'un Jésus tiraillé entre son amour pour son père adoptif, Joseph, qui le pardonna de ne pas être devenu charpentier, et celui pour son père biologique, Dieu, également actionnaire majoritaire d'un empire de croyance dont Jésus
Logique éducativea la charge. Ce Jésus-là se promenait en pull rouge, portait moustache bien taillée et raie sur le côté, et faisait ses armes dans le business religieux auprès de Jean-Baptiste, golden boy à succès, dont la piscine regorge de beaux mâles huilés. Ce Jésus-là, c'était aussi le résultat d'une technique illustrative particulière. En effet Dimitri Planchon ne dessine pas, il colle. Et si le travail se voulait plus approximatif pour Jésus, donnant à l'ensemble une touche dadaïste, Blaise, ici présent, jouit d'un travail plus net et d'une plus grande diversité de couleurs. Ainsi, là où Jésus et les copains racontait une histoire fantasque illustrée de façon monochrome et surréaliste, Blaise, qui se veut plus un regard sur notre société, profite d'une illustration plus terre-à-terre dôtée d'un chromatisme plus réaliste.
Cet album reprend lui aussi des planches de Blaise parues dans Fluide Glacial et dans L'Echo des Savanes, ainsi que des inédits créés pour l'occasion, pour tenter de donner une cohérence à l'ensemble de l'album. Le propos est évidemment de jeter un regard critique sur notre société, par le biais de celui, candide et innocent, de cet enfant à la gueule pas possible. Utilisant à fond ce concept du témoin mal renseigné, les sketches sont le fruit de ce miroir déformant qu'est le regard du petit Blaise, qui par son incompréhension face aux diverses situations, grossit et déforme les traits du monde environnant, qu'ils soient physiques ou de caractère. Tout prend alors des proportions énormes et le message ne s'encombre plus de subtilité pour dénoncer pêle-mêl
Balle atomiquee la société de consommation, les cadences professionnelles infernales, les hommes politiques avides de pouvoir, les problèmes face à l'éducation, domestique ou nationale, mais surtout et essentiellement les incohérences dans lesquelles nous nous noyons quotidiennement, en tant qu'animal social, perpétuellement en prise avec le regard d'autrui, réel ou supposé.
Au final, la critique de Planchon ne va pas beaucoup plus loin et ne dénonce pas plus que ce que d'autres auteurs, ou journalistes, raillent déjà, dans les limites de ce qui ressemble de plus en plus à une contestation convenue et de bon aloi quand on est un libre penseur. Son identité de critique se porte néanmoins un peu plus avant par la vision très acerbe de ce sportif au grand cœur, Dabi Doubane, idôle des foules admiratives du succès d'un homme sorti du marasme banlieusard, que l'on sent d'une façon diffuse être, à la fois, un décalcomanie trafiquée de Zinedine Zidane et un gros connard.
L'ensemble mérite tout de même une salve d'applaudissements, par la succession de situations dramatiquement stupides et hilarantes, absurdes et réalistes, soit par la forme, soit par le fond, à la cohésion pourtant assurée par le système illustratif, moche et ridicule, mais avec une identité forte et toujours à crever de rire, se concluant par des gueules incroyables, au premier rang desquelles celle de Blaise.