6/10Attila - Intégrale

/ Critique - écrit par riffhifi, le 25/11/2010
Notre verdict : 6/10 - Attila le un, le deux, le trois et le quatre (Fiche technique)

Tags : attila derib integrale rosy maurice dupuis tome

Les animaux qui parlent, l'histoire du neuvième art en regorge. Mais Attila est un chien espion, qui doit cacher au monde son intelligence hors normes... Une BD apparue dans les années 60, qui tourna court après quatre albums faute d'avoir su trouver son style.  

Il y a des bandes dessinées qui jouissent d'un concept aussi solide que ceux de
leurs camarades, mais qui sont condamnées à ne jamais trouver leur voie, à se prendre les pattes dans le tapis pour disparaître rapidement de la circulation. C'est le cas d'Attila, fruit de la collaboration d'un scénariste en fin de carrière et d'un dessinateur qui commençait la sienne. Le premier, Maurice Rosy, est alors le scribe de
Tif et Tondu depuis dix bonnes années ; le second, Derib, se consacrera entre autres par la suite aux célèbres séries Buddy Longway et Yakari. A eux deux, ils donnent vie au curieusement nommé Attila, un chien espion qui n'a rien d'un chef Hun ; génétiquement modifié par l'armée suisse, il est doué de réflexion et de parole, et se choisit comme couverture un gardien de fourrière (savoureuse ironie).

La première aventure, Un métier de chien, marque la rencontre d'Attila avec son associé Bourillon, et oppose le duo à une tripotée de truands patibulaires parmi lesquels on remarque les dénommés Labouf et Lerazé, destinés à revenir dans la série. Le dessin de Derib est déjà très maîtrisé, dans la plus pure tradition de l'école de Marcinelle, même si l'aspect du héros canin évolue sensiblement au fil des pages : ses oreilles descendent, son museau s'avance... Le scénario de Rosy, quant à lui, fait la part belle aux jeux de mots et à l'humour bon enfant, sur fond
d'espionnage et de ressorts comiques récurrents. Le cœur du concept réside dans la nature même d'Attila : personne ne se méfiant d'un simple chien, il peut écouter les conversations, fouiner sans avoir l'air de rien... mais ne doit pas se laisser aller à parler devant l'ennemi ! Comme épisode pilote, Un métier de chien fonctionne plutôt bien, et ouvre la porte à une grande variété d'intrigues possibles.

Mais à partir du deuxième album, Attila au château, la série commence à s'enfermer dans un lieu unique : le château d'Arvange, où réside un garçonnet blond appelé Odée. Héritier malgré lui de la fortune des comtes de Fée, il est entre les mains de son affreux tuteur Grismouron, qui convoite le trésor... Bien entendu, Attila volera (littéralement) à la rescousse du bambin, bien que son arrivée dans l'histoire soit le fruit d'un pur hasard. A partir de là, il semble que la mission permanente d'Attila et Bourillon soit de protéger Odée : les deux tomes suivants, coscénarisés par Maurice Kornblum, constituent une sorte de prolongation du deuxième volet. Dans Le mystère Z14, un nouveau chien parlant fait son apparition : apparenté à Idéfix, l'homologue d'Attila suscite quelques interrogations au cours du récit... qui tombent complètement à plat dans la dernière page. Quant à La merveilleuse surprise d'Odée, il marque l'incursion dans la série d'un élément de science-fiction inattendue : machine volante, exploration de planètes lointaines sans rapport avec l'intrigue... C'est la période qui voit Derib
s'éloigner d'Attila, tandis que Rosy et Kornblum tentent d'écrire une nouvelle aventure à leur héros.

En effet, le terme "intégrale" paraît ici légèrement usurpé, puisqu'il existe un cinquième tome d'Attila. Scénarisé dès les années 70, Bak et Flak étonnent Attila est refusé par Derib, puis oublié dans un tiroir pendant plus de dix ans ; en 1989, le dessinateur Didgé est chargé par le Journal de Spirou de mettre l'histoire en images ; la BD reste inédite en album durant vingt années de plus, et sort finalement en 2010 aux éditions La Vache qui Médite. Au vu des quelques images reproduites dans l'intégrale, on ne rate pas grand-chose...


Si la série a pris le bouillon au bout de quatre-cinq histoires, on peut cependant voir son influence dans d'autres œuvres ultérieures. Un chien qui parle, accompagné d'un bonhomme jovial à la moustache blanche : paf, vous avez Cubitus ! Un chien espion de couleur orange, plus doué que son acolyte humain... c'est Finot dans L'Inspecteur Gadget ! Un sidekick guindé qui passe son temps à dire que « ça lui rappelle le jour où... », c'est Higgins dans Magnum ! Un animal soudainement doué de parole, qui lutte contre le crime : multipliez par quatre, ajoutez des pizzas, et vous avez les Tortues Ninja ! Etc.