Miss pas touche - Tome 3 - Le prince charmant
Bande Dessinée / Critique - écrit par Danorah, le 13/09/2008 (Tags : miss touche tome hubert kerascoet prince charmant
Une suite qui garde intact le plaisir de la rencontre avec une Miss pas touche toujours aussi teigneuse, dont les soucis changent de teneur mais ne cessent pas - encore heureux, sinon il n'y aurait plus rien à raconter.
Après un diptyque dont on pensait qu'il resterait sans suite, Miss pas touche revient dans une nouvelle histoire en deux tomes. Pratique, vous pourrez sans difficulté prendre le train en marche sans avoir lu les deux tomes précédents (ce qui ne nous empêche pas de vous conseiller vivement de vous y coller quand même, ils en valent largement la peine). Toujours sous la plume d'Hubert
et des Kerascoët (qui sont deux, rappelez-vous), les nouvelles aventures de Blanche prennent une tournure pour le moins... surprenante.
Car l'élément-clé de ce récit, comme le titre l'indique, c'est l'amour ; encore qu'il soit un peu prématuré de parler d'amour dans cet opus. Disons plutôt que Blanche, toujours plus ou moins coincée au Pompadour, y fait la connaissance d'un jeune homme riche, beau, gentil (un prince charmant, quoi), mais surtout étrange, qui ne lui demande rien d'autre que de le laisser la regarder... La romance naissante entre ces Roméo et Juliette en puissance a de quoi inquiéter l'entourage des deux tourtereaux : la mère d'Antoine, qui ne voit pas d'un bon œil la liaison de son fils avec une prostituée - même vierge -, les autres filles du Pompadour, toutes à leur jalousie, et même les clients, que la jeune fille ne « satisfait » plus avec la même vigueur qu'autrefois... Et pour couronner le tout, on finit par se demander si le prince charmant est vraiment aussi sincère qu'il le prétend.
Comme tout premier tome qui se respecte - oui bon d'accord, celui-ci est numéroté comme un tome 3, mais ne jouons pas sur les mots, s'il vous plaît ; comme tout bon premier tome, donc, Le Prince charmant expose beaucoup et explique peu. On y retrouve avec plaisir la petite Blanche, toujours aussi hargneuse et ingénue, tour à tour désarmée ou désarmante, et parfois même franchement à côté de la plaque. Si on l'aime tant, cette Miss pas touche, c'est bien pour ce mélange de rage et de fragilité dans lequel elle bouillonne continuellement. Plus centré sur les relations entre Blanche et Antoine, l'album perd un peu de vue les autres personnages du bordel mais fait entrer en scène deux mères que tout oppose - celle de Blanche, et celle d'Antoine. Deux personnages, comme tous ceux qui peuplent Miss pas touche, aux caractères bien trempés et peu conciliants. Tout ce petit monde évolue dans des décors toujours aussi captivants, des tentures de la maison close aux grands escaliers de la Samaritaine, en passant par une luxueuse résidence de campagne... Le duo Kerascoët excelle toujours autant dans la représentation de Paris, de ses habitants, de la mode des années trente
(mention spéciale à la magnifique robe confectionnée pour Blanche) et dans le rendu des visages, simples, attachants et expressifs.
Même si l'album manque un peu de consistance, le plaisir de partager quelques moments de la vie de Miss pas touche est intact, et le final en forme de gigantesque point d'interrogation nous laisse trépignant d'impatience dans l'attente d'un tome 4 intitulé (évidemment) Jusqu'à ce que la mort nous sépare, qui s'annonce passionnant. Finalement, les histoires de cœur de Blanche s'inscrivent dans la droite lignée de ses précédentes aventures : elles tiennent plus du parcours du combattant que de la promenade de santé. Et si l'on en croit les quelques mots lâchés par Hubert, le scénariste, lors d'une récente séance de dédicaces, les choses ne sont pas près de s'arranger - pour notre plus grand bonheur à nous, lecteurs sadiques, qui nous délectons sans scrupules des déboires de cette jeune fille hors du commun et terriblement attachante.