Jazz Maynard - Tome 3 - Envers et contre tout
Bande Dessinée / Critique - écrit par riffhifi, le 07/01/2009 (Tags : jazz maynard tome tout raule livres roger
Fin de la trilogie espagnole polardeuse, avec une surchauffe d'action qui nuit un peu à l'ambiance pleine de tension des deux tomes précédents. Mais Jazz Maynard reste un beau gâteau savoureux.
Depuis qu'on a goûté au charme vénéneux des deux premiers tomes, on se bouffait les doigts en attendant la sortie du troisième et dernier (à moins que ?) : Jazz Maynard et son univers de polar bien nerveux, son héros invincible mais torturé, son utilisation des codes et son immersion dans un quartier remuant de Barcelone avaient de quoi séduire. Arrivé en fin de parcours, le soufflé retombe-t-il ? On se garderait bien de l'affirmer, puisque la dose d'action et de violence atteint ici son apogée ; pourtant, on peut regretter la distance que les auteurs prennent soudain avec leurs personnages centraux, délaissés au profit d'un défouraillage collectif qui fait perdre en charme ce qu'on gagne en adrénaline.
Au cœur de cette dernière partie, on trouve le fauteuil du maire de Barcelone : l'ancien est assassiné, le nouveau est un pourri. La sombre histoire de pièce volée dans laquelle Jazz s'est impliqué précédemment trouve ici sa conclusion, sous les tirs croisés des mafias barcelonaises et hongkongaises, où vient se glisser l'incorruptible commissaire Blanc (comme neige). Heureusement que Jazz a son pote Teo pour lui donner la réplique, sans quoi on risquerait d'être un peu paumés dans les méandres de l'intrigue.
S'il fallait comparer Envers et contre tout à un film récent, ce serait Mi$e à prix de Joe Carnahan : divers camps qui se mettent sur la tronche dans un espace réduit, avec un scénario solide en toile de fond mais une réelle volonté d'en mettre plein la vue... A la différence près qu'ici, le lecteur s'attend à suivre le personnage auquel il s'est attaché : Jazz, cousin hispanique et boudeur du Spike de Cowboy Bebop et du héros d'Edgar détective cambrioleur. Hissé au rang de super-héros (dommage, sa part de vulnérabilité des tomes précédents contribuait à sa personnalité), il s'immisce dans l'histoire de façon un peu artificielle, faisant équipe avec Judas là où il paraissait plus logique d'assister à une confrontation.
Le dessin de Roger Ibañez est toujours aussi expressif (un peu trop par moments), et la mise en couleurs donne plus que jamais l'impression de plonger en apnée dans une banlieue de l'enfer. Le scénario de Raule surprend, déplace le récit en le garnissant d'implications politiques et de ramifications nouvelles, et résout le tout en apothéose sans pour autant dégoûter les lecteurs réfractaires au « too much ». Le contrat est rempli d'une façon inattendue mais pas désagréable, mais laisse dans la bouche un sentiment de frustration au regard des personnages principaux, évincés au profit de l'action et de l'intrigue. En fait, les réticences qu'on peut avoir à la lecture de cet album tiennent peut-être moins de la réelle déception que du caprice : on en veut un quatrième...