Gros dégueulasse
Bande Dessinée / Critique - écrit par iscarioth, le 25/02/2006 (Tags : reiser gros livres humour france ventes film
Adeptes de la poésie bien grasse, précipitez vous ! Grand philosophe de la beaufitude, Monsieur Gros Dégueulasse vous déballe une série de répliques terribles !
Jean-Marc Reiser (1941-1983)
Dans le panthéon des plus grands dessinateurs-caricaturistes français de ces quarante dernières années, qui retrouve-t-on ? Vuillemin, Wolinski, Cabu... et Reiser ! Reiser, qui demeure le plus grand de tous aux yeux de beaucoup de lecteurs comme d'auteurs. Fondateur, avec Fred et Cavanna, du magazine Hara-Kiri, dessinant ensuite chez son successeur Charlie Hebdo, Jean-Marc Reiser a aussi travaillé pour Pilote, BD, Charlie Mensuel, Métal hurlant et L'Écho des Savanes. Ses dessins d'actualité ont été publiés sous forme d'albums à de multiples reprises par Albin Michel. Reiser figure parmi les précurseurs du genre quotidien. Il a fait rire, avec ses bandes dessinées, de situations et thèmes de la vie de tous les jours. Jean-Marc Reiser a beaucoup choqué en son temps pour la crudité de ses propos, son humour très « bourrin » et « scato ». Il a aussi été l'un des premiers à aller aussi loin dans le griffonnage et le minimalisme. Gros Dégueulasse est l'album qui résume le mieux sa carrière ; un humour piquant, incisif, non dénué d'une certaine profondeur et d'un véritable sens de la réflexion. Un véritable chef d'oeuvre.
« Il est pas jaunâtre mon slip... Il est plaqué or ! »
Adeptes de la poésie bien grasse, précipitez vous ! Grand philosophe de la beaufitude, Monsieur Gros Dégueulasse vous déballe une série de répliques terribles : « Les chercheurs de l'Université de Berkeley ont découvert qu'il était plus sain de se masturber pour dormir que d'avaler des somnifères ! ». Gros Dégueulasse est digne de figurer à la tête des plus grands mythes de la loose en BD aux côtés de perles du genre comme Jean-Claude Tergal. Les cheveux hirsutes, la barbe de quelques jours, le bout de mégot au bord des lèvres, les bourrelets bien apparents et une tenue traditionnelle qu'il arbore au champs comme à la ville : le slip kangourou trop grand, laissant dépasser les roubignolles, taché à l'avant d'une flaque de pisse et à l'arrière de traces de frein. Avec Gros Dégueulasse, Reiser a créé un personnage propice à l'exploitation totale de son sens de l'analyse absurde. Un personnage qui porte on ne peut mieux son nom, au-delà des limites les plus extrêmes de la pire scatophilie. Gros Dégueulasse pisse du haut du plongeoir à la piscine pour se faire une place dans l'eau où sauter, se fourre des frites dans le slip pour tenir au chaud son appareil trois pièces et squatte à la sortie du kiné pour peloter les fesses de jeunes femmes rendues impuissantes par un lumbago. Oui, les femmes, ce sont bien ses cibles préférées, il les rend folles hystériques et tente les pires dégueulasseries pour les attirer dans son lit. Par-dessus tout, Gros Dégueulasse est super attachant. Attachant et éphémère. Reiser n'est pas tombé dans l'écueil qui engloutit toutes les séries du genre : la redondance. L'auteur déverse sa verve et son humour corrosif en un one shot de 78 pages. Un album qui nous déboussole complèment par son final, sa dernière planche, d'un dramatique qui tranche complètement d'avec l'ambiance détachée menée jusqu'alors. Toutes les aventures du Gros Dégueulasse rapportées dans l'album sont extraites de Hara-Kiri et de l'hebdo BD. La compilation de ces strips parait en 1982 chez Albin Michel et l'album fait un carton. Trois ans plus tard sort même un film, réalisé par Bruno Zincone, avec Maurice Risch dans le rôle titre, qui fait quant à lui un véritable bide... Un film dont se souviennent uniquement aujourd'hui les grands amateurs de nanar.