8/10Le Fond du Bocal - Tome 1

/ Critique - écrit par athanagor, le 06/04/2009
Notre verdict : 8/10 - Sphère de compétence (Fiche technique)

Il y a des gens qui aiment le challenge. Poupon en fait partie : il se propose de nous faire rire avec un bocal, deux trois poissons et un joker félin, et il y parvient à merveille.

Quand on voit débarquer ce petit opus, avec son petit format et sa petite blagounette pas fameuse en couverture, on se dit qu'il ne va pas falloir s'attendre à grand-chose. Et bien on a tort, car si le minimalisme est bien le mot d'ordre de tout l'ouvrage, son exploitation par l'auteur est tout bonnement stupéfiante. Lors des premières pages, le lecteur encore sous le coup de l'à priori, ne manifeste guère plus qu'un vague sourire. Puis les pages passent, encore et encore, et on constate alors que Nicolas P
oupon parvient à ne pas épuiser un filon qui semble pourtant si ténu. En effet, et aussi incroyable que cela puisse paraître, il enchaîne des blagues du même niveau comique pendant tout l'ouvrage avec pour tout matériel un aquarium tout rond, quelques poissons rouges et à l'occasion un chat ou un humain.

Cet album et ceux à suivre (5 pour l'année 2009) sont des rééditions, chez Drugstore, d'ouvrages déjà publiés chez Le Cycliste (2001 pour celui-ci), où se succèdent des gags très brefs initialement prévus, et parfois parus, dans BoDoï ou la Balise à cartoon du journal Spirou. Contenant des gags retravaillés pour l'occasion et d'autres inédits, il s'avère difficile d'en faire une critique car il y a zéro histoire et à peine quelques personnages. Il subsiste néanmoins une forte envie de manifester la grande admiration suscitée. Non content de renouveler presque à chaque coup la blague, Poupon charge ses personnages avec des gueules formidables et donne un cours sur l'emploi des accessoires illustratifs en BD, les plus classiques étant les lignes de mouvements et les gouttelettes de sueur. Ici les poissons rouges, comme dans la vraie vie, se ressemblent tous, et s'avèrent donc être les supports rêvés pour illustrer l'impact d'une ride d'expression ou d'un croisement de nageoire pour conférer une personnalité propre à un personnage.

L'exercice imposé, que l'on a déjà eu l'occasion de voir exécuter dans le premier tome de En plein dans le mythe, où trois p
ersonnages se partageaient la BD suivant le principe de gags exprimés dans un espace très restreint (alors, la case unique) est ici brillamment réalisé. Utilisant deux ou trois dessins pour raconter sa blague (mais jamais plus), Poupon fait mouche quasi-systématiquement sans, il convient de le noter, jamais tomber dans le rire facile, qui est le propre des gens de petite extraction.

La grande magie de l'ensemble continue d'opérer quand, une fois la lecture terminée, on revient sur les premières pages qui souffrirent d'un jugement de valeur par trop hâtif. On constate alors que la plupart des gags sont excellents et que ce n'est que par une fierté mal placée et une grande envie d'être un intellectuel de gauche que l'on ne s'est pas marré lors du premier passage. On corrige bien vite ce défaut de personnalité en relisant avec attention tout l'ouvrage.

Voilà un premier tome qui sait faire espérer une suite, en partie pour avoir l'occasion de s'en taper encore une bonne tranche, mais surtout titillé que l'on est par la curiosité : Poupon saura-t-il tenir la distance sur cinq volumes ?