8/10Le Dernier livre de la jungle - Tome 3 - Le printemps

/ Critique - écrit , le 10/11/2006
Notre verdict : 8/10 - Tout en justesse (Fiche technique)

Desberg et Reculé nous offrent ici 48 pages pouponnées avec soin. Le dernier livre de la Jungle innove peu mais utilise les valeurs sûres de la narration pour nous permettre de passer un agréable moment de lecture.

Après Le crépuscule des anges, Stephen Desberg et Henri Reculé s'associent de nouveau ensemble pour retraverser sans encombre la célèbre jungle de Kipling.


A la frontière séparant la cité indienne Delhi des vastes végétations de la jungle, un vieil homme vient de louer une maison pour vivre paisiblement ses derniers jours. Ce vieillard chauve au faux airs de Gandhi à la moustache blanchie par le temps se nomme Mowgli. Au seuil son existence jadis, il se remémore l'époque heureuse et mouvementée de sa jeunesse. Son adoption au sein du clan d'Akela, sa confrontation avec Shere-Khan le tigre boiteux, son destin l'appelant à revenir côtoyer les hommes. Ses souvenirs, Mowgli les raconte à Vijay, un garçonnet attentif à toutes les anecdotes que l'ancien petit roi de la faune raconte avec émotion. Mais la nuit, les fantômes hantent les murs des bâtisses. Shere-Kahn attend le moment propice pour terrasser son ennemi de toujours. Mowgli lutte malgré la fragilité de son coeur et les souvenirs tâchés de culpabilités. Dans le tome 3 Le printemps, Stephen Desberg évoque une période importante du petit d'homme : les saisons ont métamorphosé l'enfant loup en un adolescent décidé à aller à la rencontre des siens, et à suivre Vedra. La flamme guidant ses pas dans cet univers inconnu et pour laquelle il sera prêt à braver toutes les interdictions en plus de commettre d'innombrables sacrifices. Mais sera-t-il facile pour Mowgli de se repentir des fautes passées causées par la naïveté de sa jeunesse ?


Malgré une narration classique, le scénariste réussi avec succès à nous plonger dans cet univers mêlé de nostalgie et de culpabilité. L'histoire permet ainsi de redécouvrir une nouvelle fois le Livre de la Jungle et dévoiler un aspect plus réaliste qu'avait démystifié Disney avec le célèbre dessin animé du même nom. Mowgli n'apprend pas seulement à devenir un homme, mais aussi un citoyen devant se plier au système des castes régulant la hiérarchie sociale des indiens dès leur naissance. Ainsi, le jeune garçon doit surmonter d‘importantes épreuves. Tout d'abord, trouver sa place parmi les humains en adoptant leurs moeurs et coutumes souvent jugés injustes. Un difficile processus d'adaptation où il apprendra à ses dépends que la loi artificielle des hommes est bien plus redoutable que celle instaurée par mère Nature. Même si le principe peut paraître banal, Desberg a un bon sens du découpage et de la mise en scène. Il balance avec justesse les moments de silence et les phases d‘actions. A aucun moment on ne ressent un surplus de dialogue. Le dernier Livre de la Jungle ne veut pas se positionner comme une adaptation libre du recueil d'origine. Cette affirmation ne signifie pas automatiquement que la réalisation soit mauvaise, bien au contraire. Le scénariste nous emporte vers une intrigue plus intimiste avec en toile de fond le déclin du colonialisme britannique en Inde.

Reculé a recouru à un procédé plus traditionnel pour illustrer Le dernier Livre de la Jungle. Son dessin réaliste se précise lorsqu'il utilise des gros plans, mais mériterait parfois d'être plus enclin à la composition lorsqu'il se retrouve face à un espace plus important à remplir. Cette dernière remarque est cependant du chipotage, car même si nous prenons en considération ce détail insignifiant, le tout demeure très agréable à regarder. Les doux coloris jaunis instaurent une ambiance parfois semi onirique. Ce choix des tons nous guide perpétuellement sur le chemin des souvenirs. Que ce soit le passé de Mowgli ou lorsque ce dernier refait surface. Le tout entraînent le lecteur dans un autre temps, aussi bien par rapport à la manière dont est traité le thème de la mémoire, que dans la forme. Le dernier Livre de la jungle nous rappelle ces bandes dessinées des années soixante lorsque nous posons nos yeux dessus. Un aspect technique en phase avec l'ambiance générale du récit originel ou non.


Desberg et Reculé nous offrent ici 48 pages pouponnées avec soin. Le dernier livre de la Jungle innove peu mais utilise les valeurs sûres de la narration pour nous permettre de passer un agréable moment de lecture.