6.5/10Cryozone - Tomes 1 et 2

/ Critique - écrit par iscarioth, le 18/08/2006
Notre verdict : 6.5/10 - Zombie flesh eaters (featuring Action man) (Fiche technique)

Tags : tome cryozone bajram cailleteau livre thierry denis

Critique des tomes 1 et 2 : les amateurs de cinéma gore et de zombies sauront trouver leur taux d'hémoglobine et de clins d'oeil référentiels pour afficher quelques sourires...

Il y a des projets, comme ça, qui réunissent des pointures. Cryozone en fait partie. Au scénario et au dessin, deux grands maîtres du genre SF, dans le paysage de la bande dessinée franco-belge. A ma gauche, le scénariste Thierry Cailleteau, père d'Aquablue, l'une des plus grandes séries de bande dessinée SF. A ma droite, Denis Bajram, auteur complet d'Universal War One, série reconnue unanimement par la presse et les bédéphiles comme la dernière grande claque du genre. Nous sommes en 1996 lorsque parait le premier des deux épisodes de Cryozone. Denis Bajram est alors encore inconnu et le premier cycle d'Aquablue est au point mort depuis 1993, suite à une brouille entre Thierry Cailleteau et son dessinateur Olivier Vatine. La deuxième moitié du diptyque Cryozone parait en 1998. Et en 2005, Delcourt nous gratifie d'une réédition intégrale. Réédition motivée par le succès toujours croissant de Bajram et Cailleteau ou par le simple fait d'un diptyque de qualité ?

Punch lines et gueules cassées

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Sueurs froides, tome 1, 1996
 L'histoire se déroule dans un vaisseau spatial, rempli de colons cryogénisés, traversant l'espace pour atteindre une planète à conquérir hors du système solaire. Mais même loin de la planète bleue, la nature humaine persiste dans ses travers. La société Cryozone, chargée de la cryogénisation des passagers, a mal fait son travail et ces derniers dégénèrent en zombies. A bord, des agents de la multinationale essaient d'étouffer l'affaire, par tous les moyens. L'emprise du capitalisme et des multinationales sur les grandes entreprises humaines était un thème déjà très bien exploré dans le premier cycle d'Aquablue. Thierry Cailleteau remet ici le couvert en nous démontrant jusqu'à quel point l'hégémonie d'un grand groupe financier peut avoir des conséquences démesurées et meurtrières. On imagine assez facilement Cryozone adapté en un gros blockbuster américain. Malgré des albums assez bavards, on retrouve les mécanismes du film d'action : l'enchaînement des péripéties, mais aussi une typologie des personnages marquée. D'un coté, il y a un couple de héros : Lise, femme médecin intelligente, dynamique et sexy. Et Slobodan, grand colosse doué pour boucheries et castagnes. Forcément, en face, il y a le patibulaire, le sans pitié, le méchant Zdic, qui se démène pour faire du vaisseau spatial un gigantesque cercueil à la dérive. Cryozone est très marqué par de lourdes scènes expositionnelles. Exemple, dès les premières pages, avec un discours officiel du commandant qui sert de longue introduction pour présenter au lecteur les personnages. On n'échappe pas non plus à la longue, improbable et ô combien clichée tirade finale du « méchant », qui, avant d'assassiner les héros (assassinat avorté, bien sûr), leur explique le pourquoi du comment de ses plans machiavéliques.

Massacre à la poinçonneuse

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Syndrome Z, tome 2, 1998
 Le scénario de Cryozone est typé et prévisible, les personnages pas franchement bien fins ni attachants. Le bon coté du diptyque, c'est qu'il nous rappelle de très bons moments de cinéma. Cryozone nous remet tout d'abord en tête des films de zombie, notamment ceux de Romero. Enfermés dans un endroit et cernés par les zombies, l'équipe de Cryozone rappelle celle du Jour des morts vivants de Romero. Quelques scènes font d'ailleurs beaucoup référence au film (l'encerclement sur la trappe, fin du premier album, rappelle le final du troisième opus de la quadrilogie Romero). Cailleteau tire sur les mêmes ficelles que Romero, à savoir celles du huis clos horrifique, de la claustrophobie et de la démesure gore. Slobodan, tout en muscle et à l'aide de quelques punch lines bien placées, multiplie les similitudes avec des Schwarzenegger et autres Stallone qui dézinguent en série avec autant d'humour que de classe (« On n'est pas trois, on est cinq... Vous deux, moi... et Black et Decker ! » nous lance le personnage, une tronçonneuse à la main). Graphiquement, Cryozone vieillit. Les planches fleurent bon l'esthétique des années quatre-vingt-dix, lors desquelles les dessinateurs-coloristes n'étaient pas encore tous armés de l'incontournable infographie. Les scènes gores sont plutôt sympathiques et généreuses en effets sanguinolents. Les tonalités de couleur sont bien choisies, pour renforcer les impressions de glauque et d'enfermement malsain. Le long face à face de Lise contre Zdic, milieu du deuxième album, se déroule tout entièrement sous des lumières rougeâtres, qui burinent les visages à la manière de certains comics (Zdic a d'ailleurs quelques allures d'Octopus).


Cryozone déçoit par un scénario sans âme, accumulant les pires clichés d'une superproduction hollywoodienne d'action. Malgré tout, les amateurs de cinéma gore et de zombies sauront trouver leur taux d'hémoglobine et de clins d'oeil référentiels pour afficher quelques sourires...