Câlinée sous X
Bande Dessinée / Critique - écrit par Maixent, le 29/02/2012 (Tags : cornette luc jean sous   calinee pages
Kyra est un peu larguée. Pas vraiment une paumée mais souffrant de la solitude, déchirée entre l’adulte qu’elle devrait être et l’enfant qu’elle a été. Dans l’ensemble ça va, mais elle s’emmerde quand même un peu. Elle se cherche mais peut-être pas au bon endroit. Elle rencontre des gens. Parfois une histoire de cul, parfois un peu plus. Rien de réellement épanouissant.
Combat de mâlesKyra est représentative d’une génération de moins de trente ans déjà fatigués qui ne savent pas très bien où ils vont et enchaînent les aventures pour se donner le sentiment d’exister sans vraiment se pencher sur leurs réelles envies, ni avoir le courage d’aller plus loin. Génération fragile n’ayant connu que la crise et n’ayant pas vraiment d’idéaux à défendre, elle se contente de flotter entre deux eaux sans vraiment s’investir. Ainsi Kyra a un seul réel amour, son ours en peluche, Teddy, un parfum d’enfance perdue, de sécurité et une absence totale de risque vu que Teddy ne sera jamais un salaud contrairement aux autres.
À part Teddy, il y a Etienne, l’ex un peu envahissant, assez connard et pas très intéressant qui continue à passer chez Kyra sans prévenir histoire de tirer un coup, profitant de la force de l’habitude, pas du tout prêt à s’investir pour un vrai couple mais toujours là parce que quand même Kyra elle est bonne et elle ne se défend pas trop. Il y a aussi ce gros gentil qui vient suivre les
Poulet au Bacon cours de Tai chi, ou cet artiste troublé par les toiles de Rothko et qui se fait une joie d’en expliquer la poésie à cette jeune étourdie. Il y a le passé, les coups d’un soir, les expériences homosexuelles et dominatrices. Bref, toute une galerie de personnages pas vraiment caricaturaux mais pas loin quand même qui contribuent à cette atmosphère de Bobo parisien pas détestable mais pas passionnante non plus.
Au niveau du dessin il y a quelques fulgurances, un regard amoureux en fin d’album, un poulet rôti sur fond rouge, façon Francis Bacon, de petits effets mangas assez mignons et parfois même des perspectives vraiment travaillées desquelles se détachent les personnages donnant un aspect en relief réussi. Malheureusement, ces petites trouvailles
Retour à l'appart'graphiques ne donnent pas une cohérence à l’album et si certaines cases sautent au visage c’est aussi car elles sont entourées d’autres assez médiocres.
Câlinée sous X est un album moyen dont on comprend les tenants et les aboutissants mais qui est travaillé exactement de la façon dont travaillent les personnages eux-mêmes, nonchalamment, sans passion (ce qui est sans doute imputable au fait qu’il s’agisse d’un album de jeunesse). Il manque cette étincelle de vie et on oublie l’album deux heures à peine après l’avoir fini. On perçoit bien sûr un travail, des points de qualité et un certain style reconnaissable, mais on a du mal à être happé. On ne retrouve pas cet aspect engagé que l’on a pu voir dans Arthur & Janet des mêmes auteurs, ces jeux complices au sein du couple et cette joie de vivre qui était transmise non seulement par le scénario, mais aussi par le dessin aux couleurs chaudes.
Là, même si c’est assez joli au premier abord, il manque un fond et rééditer cet ouvrage paru en 2007 chez Carabas n’était peut-être pas une priorité. On garde un récit intimiste et léger qui est loin d’être détestable et on ressent le potentiel des auteurs ce qui est encore plus dommage tant on se dit à la fin de l’album qu’il ne manquait finalement pas grand-chose pour faire beaucoup mieux.