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6/10Madame désire

/ Critique - écrit par Maixent, le 17/02/2024
Notre verdict : 6/10 - Vaudevillesque (Fiche technique)

Tags : public pages madame erotique mardon gregory dynamite

Lutte des classes années 30

Il est de ces auteurs capables d’aborder tous les styles avec une aisance indéniable. Comme si tout leur était acquis, s’appropriant les genres pour en faire leur marque de fabrique. Il en est ainsi pour Grégory Mardon que chacun semble connaître mais souvent sous un seul aspect. Auteur multiple, on a pu le découvrir à travers Le Fils de l’Ogre, conte médiéval épique et tragique, Cycloman, une bande dessinée de super héros très particulière ou encore Les bijoux de la Kardashian, entre presse people et roman de gangsters. Une œuvre conséquente dont le trait principal reste dans tous les cas une profonde compréhension et un questionnement toujours pertinent des sentiments humains. Il est donc tout naturel que Grégory Mardon se tourne également vers l’érotisme comme on a pu le voir en 2022 avec Amour Cru. Mais déjà une première incursion avait été faite en 2009 avec Madame désire ? Dont Dynamite propose la réédition, cette fois ci en couleur.


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Dans une ambiance primesautière années 30, Simon et Anatole profitent de la mise en place des deux semaines de congés payés par le Front Populaire pour sillonner la France à bicyclette. Égarés devant un château de province, ils vont pour demander leur chemin lorsqu’ils se retrouvent embringués dans un quiproquo et prennent la place des deux domestiques attendus, surtout que l’atmosphère d’un érotisme diffus qui règne sur le domaine leur met très vite la puce à l’oreille. Abandonnés par Monsieur, les lieux ne sont plus habités que par Colette, la domestique ; Emilie, sa fille et Madame. Henri, le fils dégénéré est bien présent sur les lieux mais son attitude de roquet mal dégrossi ne peut en aucun cas satisfaire les désirs de ces dames aux caractères divers mais toutes portées sur la lascivité.
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Dès le lendemain de leur arrivée, Simon fricote avec Madame dont les intentions sont très claires. En parallèle, les attaques sournoises de Henri n’ont de cesse de se multiplier envers les gouvernantes mais celles-ci, taquines et joueuses profitent de l’agacement du freluquet, le poussant dans ses retranchements entre jeux cruels et plaisirs pervers. Il n’y a qu’Anatole qui reste véritablement sur sa faim jusqu’à ce qu’il parvienne à « baiser une dame de la haute ». Les sens agacés par la chaleur, la solitude, et surtout le retour de Monsieur, vont faire en sorte que cette ambiance érotique et moite va vite dégénérer en pur sadisme. Le mâle alpha va vite reprendre sa place, surtout face à des « communistes paresseux » et c’est surtout Simon qui en payera les frais.


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Avec Madame Désire ?, on renoue avec le genre du vaudeville classique. Grégory Mardon lui donne un tour plus érotique là où par tradition on restait dans le graveleux, la friponnerie et la légèreté. Construit comme une pièce de théâtre avec une harmonie de temps et de lieu, les actions s’enchaînent rapidement, ne laissant pas au lecteur le temps de se poser et laissant la place belle au rocambolesque. Sous cette apparence désuète de bouffonnerie érotique, Grégory Mardon propose cependant une lecture sociale qui, bien que datée dans le récit, est toujours pertinente.

A rapprocher dans son trait d’auteurs comme Christophe Blain ou Kerascoët, dont l’héroïne, Miss Pas Touche, pourrait facilement faire partie du même univers, Grégory Mardon s’inscrit dans cette génération d’auteurs au style graphique que l’on pourrait qualifier de « spontané ». On pensera également à Trondheim et Sfar, qui ont su, par le rythme donné à leurs planches, renouveler le genre. Madame Désire ? n’échappe pas à cette idée de mouvement quasi frénétique et ces remous permanents que ce soit dans le dessin ou la succession des cases.

Tant dans sa construction vigoureuse que dans sa thématique universelle, Madame Désire ? offre un moment de lecture assez agréable bien que convenu.