W.E.S.T. - Tome 5 - Megan
Bande Dessinée / Critique - écrit par riffhifi, le 17/07/2009 (Tags : tome dorison xavier nury megan fabien pages
La saga prend un tour plus intimiste, et verse dans le fantastique avec un panache renversant. Rossi, Nury et Dorison sont loin d'avoir tiré toutes leurs cartouches.
Le troisième diptyque commence, nous sommes désormais en 1903. Les scénaristes Fabien Nury et Xavier Dorison se détournent de la guerre civile pour se pencher sur une intrigue surnaturelle plus intimiste, qui donne l'occasion au dessinateur Christian Rossi d'être d'autant plus efficace. Les auteurs le disent eux-mêmes : « On a essayé de lui écrire quelque chose de plus simple, qui offre plus d'émotion et de possibilités de mise en scène ». Plus simple en apparence seulement, car l'intrigue s'avère complexe et dense à souhait.
Rentrés de Cuba la tête haute, les membres de la Weird Enforcement Special Team vont devoir faire face à une menace moins ample mais plus insidieuse que précédemment : la propre fille de Morton Chapel, possédée par un démon héréditaire... Le leader de W.E.S.T. voit son passé lui revenir en pleine poire, puisqu'il a dû abattre sa propre femme lorsque la créature était en elle.
S'il en a toujours été le pilier, Chapel devient cette fois le héros incontesté de la série. Bien que le qualificatif de héros puisse être contesté dans le cas de cet homme coupable d'avoir tué sa femme, ruminant depuis lors une culpabilité qu'il tente d'écarter du revers de ses certitudes. Le personnage est assurément passionnant, et va désormais bien au-delà de sa simple allure de baroudeur moustachu ; le scénario n'oublie pas pour autant de développer les autres membres de l'équipe, avec leurs caractères disparates, leurs frustrations et leurs vices. Le récit est palpitant, plein de tension et appelle une suite qu'on imagine tragique, effroyable et sublime.
Le dessin réaliste de Rossi porte l'album à bout de bras, déclinant son classicisme classieux sous diverses formes : la narration simple mais percutante, l'illustration splendide en larges cases (planches 4, 12, 22...), la mise en parallèle furieusement évocatrice (planches 20-21)... Le dossier de presse nous informe que l'artiste expérimente dans ce tome une nouvelle technique au lavis, ce qui lui permet notamment de donner un aspect « flou » au premier plan, ou de distinguer subtilement créatures réelles et irréelles.
Féroce, imaginatif, visuellement renversant, ce cinquième tome de W.E.S.T. annonce ce qui pourrait bien être le meilleur diptyque de la jeune série, et permet d'envisager encore quelques belles années à ce western surnaturel qui jouit d'une belle conjonction de talents au scénario et au dessin. Le tome six s'appellera Seth, ce qui prouve que malgré toutes leurs qualités, les auteurs sont mauvais en maths (et en orthographe).