6/10La Véritable histoire de John Dillinger, ennemi public n°1

/ Critique - écrit par riffhifi, le 08/07/2009
Notre verdict : 6/10 - American gangsters (Fiche technique)

La vie éclair de John Dillinger, sorte de Jesse James des années 30 qui fit une carrière-express dans le banditisme. L'album relève plus du livre illustré que de la bande dessinée proprement dite.

L'étude de la vie du dénommé John Dillinger est plein de chausse-trappes : on le présente comme un chef de gang à une époque où ce rôle est dévolu à Harry Pierpont, on le dit mort en 1934 mais plusieurs théories viennent contredire cette affirmation... Cet opus de chez Denoël Graphic, estampillé « La véritable histoire de John Dillinger » et opportunément paru deux mois avant la sortie sur les écrans
du
Public enemies de Michael Mann (d'où le sous-titre, lui aussi opportun, « Ennemi public n°1 »), possède lui aussi son lot de faux amis : on pourrait croire la chose américaine, mais elle est l'œuvre de deux Français ; on s'attend à de la bande dessinée, on découvre un livre illustré...

John Dillinger, né en 1901 et supposé mort en 1934, a passé une bonne dizaine d'années à pousser et une dizaine d'autres à croupir en prison, ce qui ne lui laisse que dix petites années d'existence aventureuse... qui rentrèrent dans la légende. Erigé au rang d'ennemi public n°1 par un J. Edgar Hoover qui avait besoin de faire émerger des figures symboliques, il rallia la sympathie du public d'une façon comparable à Jesse James en son temps, devenant lui aussi un "brigand bien-aimé" dont les exploits semblaient être davantage des pieds de nez à la société que des crimes contre les honnêtes gens.

L'histoire de Dillinger est retracée ici de façon purement factuelle et documentaire, sans la moindre volonté de romancer les faits : le texte de Miriana Mislov est fait de phrases simples et explicatives, et amène le lecteur de la naissance à la mort du gangster de façon assez strictement chronologique, glissant occasionnellement quelques phrases ayant été prononcées par les intervenants. Afin de cerner le contexte de l'époque, de nombreux encadrés détaillent la personnalité des figures majeures du récit : complices, compagnes, policiers, agents du FBI, hommes politiques... On croise donc au fil des pages les célèbres Bonnie & Clyde, ‘Baby
Face' Nelson, etc., au point que l'on se surprend à regretter qu'il ne s'agisse pas d'un ouvrage plus généralement dédié au banditisme des années 20-30, qui aurait exploré les différentes personnalités de façon plus approfondie.

Les illustrations de Thierry Guitard, surprenantes, évoquent le pop-art des années 60 : violemment stylisées et colorées à l'aide de jaunes et de roses flashy, elles offrent un regard décalé sur les faits qui n'appartient ni à l'époque décrite ni à la nôtre. Le résultat est plutôt intéressant, bien que l'on aurait préféré davantage de mises en scène et moins de portraits (pour lesquels des photos auraient été tout aussi bienvenues, plutôt que d'aligner façon Photomaton des dessins anguleux qui finissent par tous se ressembler).

Si l'on désire s'armer d'informations générales sur Dillinger avant d'aller voir le film, le livre de Miriana Mislov et Thierry Guitard est un bon choix, illustré avec caractère. Mais le côté extrêmement peu littéraire de la chose (allant jusqu'à la multiplication de fautes d'orthographe et de typographie), qui n'assume pas non plus un statut de bande dessinée (seules quelques pages comportent des échanges sous forme de bulles), risque de rebuter aussi bien les amateurs de bande dessinée pure et dure que les lecteurs à la recherche de précisions ou de style.