5/10Ric Hochet - Tome 75 - Code pour l'au-delà

/ Critique - écrit par athanagor, le 02/10/2008
Notre verdict : 5/10 - ... puis tapez dièse (Fiche technique)

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C'est une fois encore avec un fol espoir que les fidèles ouvriront, tremblant, ce 75e Ric Hochet. Mais ils seront vite déçus : il s'habille toujours pareil.

Il est comme ça, des séries cultes qui ont bien fonctionné et acquis un public fidèle, qui coulent lentement, mais sûrement, dans des abysses de ridicule insondables. Les auteurs ne donnant plus vraiment l'impression de faire leur boulot par simple plaisir, mais surtout soit pour tirer encore quelques menues piécettes des mains tremblantes de fans qu
"Nadine" Tibet, période bleue
i veulent encore y croire, soit pour se prouver, pour des questions de fierté mal placé ou par peur de l'anonymat, qu'ils sont encore capables d'en coller plein la vue à leurs lecteurs. Parfois même sont-ils persuadés que c'est ainsi que vont les choses et qu'on ne peut s'opposer à l'ordre du monde. Mais même les plus grands musiciens abandonnent un jour leurs instruments à leurs vieillesses, leurs corps usés ne sachant plus comment se conduire sous les directives de leurs esprits, et, n'étant plus capables d'offrir autre chose que du médiocre, ils laissent à d'autres le soin de servir leur art, en se réservant le droit d'en être, si ce n'est une source d'inspiration, du moins un spectateur privilégié. Ce sacrifice est d'autant plus respectable que chacun peut ressentir au fond de lui son prix. Mais certains s'y refusent catégoriquement et c'est alors le médiocre qui l'emporte.

A cet égard, ce 75e opus (eh oui !) de Ric Hochet, suivant d'un peu moins de 8 mois l'hilarant Puzzle mortel, montre une nouvelle fois à quel point il est navrant de voir des vieilles gloires tenter sans répit des come-back forcés, ne constituant au final qu'une jolie collection d'échecs.

Débarquant chez Nadine, à priori pour la faire boire, Ric Hochet reçoit sur le portable qu'il vient de s'acheter un appel du grand illusionniste du moment, Dihouny, fervent admirateur d'Houdiny, dont le nom est un subtil anagramme. Comme il vient Non Ric, ce n'est pas un gâteau.
Non Ric, ce n'est pas un gâteau.
justement de recevoir un message d'une voyante le prévenant de la mort prochaine du magicien, Ric décide de coller son museau dans la mélasse. Et une fois de plus il aurait mieux fait de faire boire Nadine et d'oublier tout ça. Malheureusement pour lui (et un peu aussi pour le lecteur) il se retrouve embarqué dans une suite d'événements plus mystérieux et inquiétants les uns que les autres. Le grand magicien, échappant de justesse à sa mort annoncée, disparaît de la capitale pour réapparaître quelques jours après dans la Méditerranée, devant sa maison à Cassis. On pourrait donc penser que c'est un excellent magicien. Que nenni. Il réapparaît certes, mais il souffre d'amnésie. Amnésie fort sélective d'ailleurs car il se souvient de qui il est, de ses amis, de Ric, de sa tentative d'assassinat et même qu'il n'aime pas le foie de veau. Mais pas de ses tours de magie. Voilà. Le reste de l'album brode sur ces quelques faits et nous sort pour finir un méchant et un mobile, l'un connu, l'autre incompréhensible.

Bien qu'un petit peu mieux agencé et dessiné que le précédent (mais ça, c'était facile), cet ouvrage arrive également à intéresser un peu plus (quoique ça aussi...), mais comme à l'accoutumé, on reste, avec le Ric Hochet dernière version, perdu entre le doute et la perplexité.

S'ouvrant sur une suite d'effets narratifs mettant en avant une véritable volonté de prendre les choses à la rigolade, l'album finit par retomber dans le sérieux propre à une enquête portant sur une tentative de meurtre. Cette forme est symptomatique de tout l'album qui donne l'impression que les auteurs commençaient leur travail d'écriture chaque matin en oubliant complètement de relire ce qu'ils avaient pu pondre la veille. Ainsi, hormis une véritable constante que constitue le fait que tout le monde, auteurs comme personnages (et souvent aussi les lecteurs), considère que Nadine est conne à bouffer du foin, toute l'histoire est émaillée d'éléments rarement conclus. Ça peut encore passer quand il s'agit de faire apparaître le frère jumeau d'un des personnages principaux, pour aucune autre raison que de grappiller deux ou trois cases dans le but mal dissimulé d'atteindre péniblement les 48 pages, mais c'est plus embêtant quand il s'agit d'expliquer le mobile des criminels autrement que par une vague intention de s'en mettre plein les fouilles. Car à ce degré il auC'est quoi le truc sur le canapé ?
C'est quoi le truc sur le canapé ?
rait suffit de faire apparaître un gars de nulle part dans l'avant-dernière page en disant que c'était lui le coupable. Même constat concernant le modus operandi des malfrats qui parviennent à effacer sélectivement des souvenirs mais dont la procédure est totalement occultée. Bref on nous prie de croire qu'ils y sont arrivé parce qu'ils voulaient le faire. Au final, les méchants se font serrer car, alors qu'ils savent parfaitement à qui ils ont affaire, ils attachent ensemble Ric et le magicien (soit un gars dont le métier consiste à s'échapper) et les laissent seuls pendant une demi-heure. Donc évidemment quand ils reviennent de la buvette pour voir s'ils sont bien morts, Ric et le magicien les attendent depuis dix minutes avec le flingue qu'ils ont, en plus, oublié de leur prendre. Etrangement... on se sent insulté.

Ainsi les auteurs se perdent, et leur identité avec, en tentant encore de rafraîchir ce personnage qu'est Ric Hochet, le faisant évoluer au gré des générations. Mais si cette manœuvre était permise dans les années 80 à des Tibet et Duchâteau encore verts et au fait de leur époque, on sent incroyablement le poids des années sur ces mains qui tiennent cette plume et ce pinceau. Dans une tentative presque navrante de vouloir montrer aux lecteurs qu'ils ne sont pas finis, ils usent de ficelles qui puent le jeunisme à 100 bornes, comme s'ils avaient regardé Hit machine pendant une demi-heure pour se faire une idée de comment on cause aujourd'hui, et basé l'essentiel de cette technique sur des blagues tournant autour de la couleur des cheveux de Nadine. Mais au final, cette maladroite tentative, qui n'est présente que dans les dix premières pages, ne sert qu'à perturber l'unité de l'ouvrage. Et l'artifice s'évente aussitôt, car il s'agit tout de même d'une enquête où le personnage principal, un illusionniste, fait des tours en grande pompe dans la capitale, rameutant des centaines de curieux dans son sillage, et ainsi cet artiste fait la une des grands quotidiens nationaux. Or quelqu'un ici se souvient-il avoir vu un magicien en première page d'un quotidien national ou faire partie des titres du 20 heures ces 70 dernières années ?... eh ouais... à vous non plus ça ne vous dit rien.

Ah... au fait, ne cherchez pas de rapport entre le titre et l'histoire, il n'y en a pas.