4/10La Rebouteuse

/ Critique - écrit par athanagor, le 26/02/2009
Notre verdict : 4/10 - La rebuteuse (Fiche technique)

Dans les villages français, il y a des mamies qui font des tisanes avec des herbes pour devenir riche, et d'autres du thé contre l'ennui. Mmmh... lesquelles choisir ?...

Il est parfois assez étonnant de constater le pouvoir que détient la couverture d'une BD. En un clin d'œil, quand elle est bien faite, elle est capable de donner un irrépressible envie de dévorer l'ouvrage, en dévoilant l'atmosphère générale Hum...
Hum...
et donnant déjà des clés de compréhension de l'intrigue. On se dit alors : « ah ça ! J'le lirais bien ! ». C'est une sensation qui s'avère d'autant plus forte quand, comme c'est le cas ici, tout ce qu'on avait pu se construire en une demi seconde le temps de mirer la devanture, se trouve contredit dès la première case de l'ouvrage. Ici, une incroyable dichotomie de perception harcèle le lecteur dès le début, dichotomie pourtant inexistante, comme le retour sur la couverture en témoigne. Il s'agit bien du même trait devant et dedans. Mais que s'est-il donc passé ? Eh bien exactement ce qui vient d'être dit : la couverture présente cette vieille personne prenant son thé sur fond de bocaux qui, à y regarder de plus près, portent les noms des différents personnages qui peuplent le village et ont recours au service de la rebouteuse. Il s'agit donc des fameuses clés évoquées plus haut. Mais ce fond est travaillé en un contraste plus passé, pour mettre en valeur les traits clairs et bien définis de la rebouteuse. Or, dans le corps de l'ouvrage, foin de tous ces détails graphiques, et la simplicité du trait, pourtant déjà apparente, accapare tout l'espace. On reste sur sa faim.

C'est d'ailleurs comme un leitmotiv pour tout cet ouvrage, rester sur sa faim. La vieille dame présentée comme la meneuse des pages à venir et dont on pense suivre une tranche de vie, brille par son absence et ne se manifeste qu'à la fin. Certes, malgré cette absence, il n'est question que d'elle dans tout l'album, montrant ainsi le pouvoir qu'elle exerce sur les habitants de son village. Mais on ne la voit pas et on ne comprend que d'une façon très diffuse comment elle gère sa manipulation. Cette faim insatisfaite se manifeste donc aussi sur l'impression d'avoir à peine effleuré le sujet central qu'est ce pouvoir eKoff, koff...
Koff, koff...
xercé sur autrui. Cette impression est renforcée, autre faim dure à calmer, par l'impression de n'avoir qu'à peine rencontré les personnages. Les pages, souvent vides de texte et de détails, peuplées par des dessins immobiles si envahissant que l'on a le sentiment de lire un livre plus petit avec une loupe, se tournent incroyablement vite et l'ouvrage se ferme alors sur un « Déjà ! » surpris et déçu. La vitesse d'exécution se traduit par l'impossibilité du lecteur à s'intéresser aux personnages et ainsi pouvoir leur témoigner la quelconque sympathie, ni le moindre intérêt.

La réflexion finale, immanquablement suscitée par le sujet et le temps qu'il reste à glander dans la baignoire, déçoit encore un peu plus. En l'absence de tout dénouement tangible, l'histoire, alors inexistante, et son cortège de suppositions se transforment en un bête constat, que l'on hésite à transposer à tous les villages de province.

Bref l'ensemble, malgré l'intérêt que l'on comprend y trouver avec cette histoire sur les rapports humains, ne déclenche aucun enthousiasme et n'amorce tout au plus qu'une morne apathie, suivie d'un haussement d'épaule découragé. On sent que peu de choses manquent pour en faire une très bonne BD, mais bien malin celui qui saura trouver quoi.