6.5/10Et toi quand est-ce que tu t'y mets ? - On l'appellera Simone

/ Critique - écrit par Maixent, le 29/11/2012
Notre verdict : 6.5/10 - l'IVG raconté aux adultes (Fiche technique)

Tags : quand tome mets cazot simone appellera veronique

On se repose la question pour une seconde fois. Cette question qui concerne toute personne passée la trentaine face à une société ayant toujours du mal à concevoir l’épanouissement personnel sans être réveillé la nuit par des pleurs ou les deux mains dans des couches nauséabondes. A savoir quand est-ce qu'on va s'y mettre?

Si le premier tome gardait une certaine légèreté de ton malgré une
Avis d'expulsion
véritable implication dans le sujet, celui-ci est beaucoup plus didactique, s’inscrivant dans une tradition féministe et engagée. Le sous-titre en effet renvoie directement à deux célèbres Simone qui ont beaucoup milité pour les droits des femmes, Veil et Beauvoir. Plus précisément, l’album traite ici de l’avortement, d’où un ton plus sérieux. Nous ne sommes plus dans le choix d’une vie libre face aux autres mais dans la résolution d’un problème complexe, un incident appelant une réponse immédiate et souvent difficile, même s'il s'avère que le choix peut paraître évident.

Lucie, 20 ans, tombe enceinte, mais il s’agit plutôt d’une mauvaise surprise. Prises dans les contraintes de la mise en place de sa jeune vie (nouvel appart, nouvelle école), sans être vraiment contre l’idée, elle considère que ce n’est pas vraiment le moment. Reste maintenant à entreprendre un véritable parcours du combattant pour assumer ses choix. Car si l’avortement est un droit, tout comme la vasectomie ou la pose d’un
Toi, t'as rien compris
stérilet, il n’est pas toujours facile de les faire valoir. Les étapes sont ici très bien rendues. L’annonce au copain, l’annonce aux amis, les angoisses, les renseignements pris sur internet et le déferlement de violence des anti-IVG, le planning familial. Bref, toutes les démarches et tout le mécanisme qui se met en place malgré soi, rajoutant d’autant plus de difficulté pour un acte qui n’est pas anodin, ce dont la plupart des gens ont déjà conscience sans qu’il soit nécessaire de leur rappeler à tout instant. Et surtout, la culpabilité que peuvent vous faire éprouver ceux que vous allez côtoyer durant cette période, souvent sans méchanceté mais dans un réflexe nataliste, conditionnés depuis le début par le fait qu’une naissance est « ce qu’il y a de plus beau au monde ». En parallèle, nous retrouvons Jeanne, l'héroïne du premier tome, toujours décidée à rester sans enfants et trouvant son épanouissement dans le monde de l'art. Et Adeline, dont le plus grand bonheur est d'être mère.

Sans jamais sombrer dans la caricature et sans utiliser de grosses ficelles,
Pression sociale
les auteurs réussissent à faire passer un message. Elles s’adressent certes  à un milieu plutôt intellectuel, avec une certaine  finesse d’esprit et un rapport aux choses qui n’est pas adopté par tous, mais par le biais du dessin conservant cette douceur naïve (malgré des passages gores comme dans le premier tome), elles touchent à l’universalité. Alors certes, on a ce ton didactique mais on est bien loin de la plaquette mal dessinée du planning familial censée intéresser les jeunes. La plupart du temps, le format BD, pour traiter des problèmes de société est sous exploité et les problèmes en question prennent le pas sur la qualité du dessin ou du scénario, comme l’a pu l’être par exemple il y a quelques années Jo de Derib, traitant du Sida, qui, s’il reste un ouvrage important et plein de bonne volonté n’en reste pas moins l’un des plus mauvais de l’auteur. Ici, on conserve la qualité artistique, mise au service d’un sujet de société.

Ainsi, même si le deuxième tome est moins réussi que le précédent, moins incisif et contraint de suivre une certaine progression afin de faire passer un véritable message, il reste tout à fait honorable et bien exécuté, gardant la sensibilité et l'intelligence du premier tome.