8/10Poison Ivy tome 3 vs. Tigresse Blanche tome 5

/ Critique - écrit par riffhifi, le 02/04/2008
Notre verdict : 8/10 - Poison Ivy - Tome 3 - Baraka à Bir Hakeim (Fiche technique)

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Le poison contre la tigresse : deux séries de Dargaud se tirent la bourre actuellement. A l'heure où elles sortent respectivement leur troisième et leur cinquième tome, laquelle aura le dessus ?

Dargaud propose actuellement deux séries aux thèmes et aux tons furieusement semblables : Poison Ivy et Tigresse blanche sont toutes les deux des femmes dangereuses et entraînées à se battre, évoluant dans un passé clairement identifié (la deuxième guerre mondiale, la guerre froide), et les deux séries font preuve d'un humour de bon aloi en jouant sur les clichés associés à la période traitée. Entre autres coïncidences, on remarquera que le deuxième tome de Poison Ivy est titré Tigresses volantes. Ces ressemblances frappantes ont une explication simplissime : les deux séries ont été créées par le même homme, le prolifique scénariste Yann. Mais si la vénéneuse Poison Ivy continue de fleurir sous sa plume, la Tigresse Blanche a été laissée à partir du troisième tome aux mains du dessinateur Conrad, qui s'est associé dès le suivant à Wilbur. Aujourd'hui, le tome 5 de Tigresse Blanche, appelé L'année du Phénix, côtoie le tome 3 des Exploits de Poison Ivy, intitulé Baraka à Bir Hakeim. Les deux séries valent le coup d'œil, mais si vous les découvrez ensemble aujourd'hui, votre porte-monnaie va peut-être tirer la tronche devant les huit tomes à acheter. A choisir, on vous conseillera plutôt Poison Ivy, plus drôle, plus audacieuse, plus originale.

En février, c'était le nouveau tome de Tigresse Blanche qui sortait. Alix Yin Fu, agent communiste, doit démasquer le traître qui se cache dans les rangs de sa triade des Tigresses Blanches, pour prouver sa propre innocence. Elle est aidée Tigresse Blanche tome 5
Tigresse Blanche tome 5
par son ami français Maurice Rousseau. Mystère et espionnage entre Hong-Kong et Londres, héroïne exotique au service du communisme chinois des années 20, tous les ingrédients du récit d'aventure sont réunis. Le dessin est libre, généreux, et s'étend souvent jusqu'au bord de la page. On ne s'étonnera pas qu'un journaliste de Libération (qui a pré-publié l'album et appose un sticker à son nom sur la couverture) compare Conrad à Franquin : effectivement, on s'attendrait plus à trouver ce type de dessin dans le Journal de Spirou, chez Dupuis. Avec son héroïne sexy et volontaire à la Natacha ou Yoko Tsuno, Tigresse Blanche atteint son objectif mais reste une bande dessinée un peu bridée (promis, c'était pas fait exprès, mais maintenant que c'est écrit je vais pas l'enlever bien que ce soit un jeu de mots pourri et éculé depuis soixante-quatre ans et trois mois) là où Poison Ivy réussit à décoller grâce à son humour décapant.

En mars, c'était donc la troisième partie des aventures du WOW (Women on War) qui atteignait les rayonnages avec son titre digne d'un bouquin de OSS 117. Dans la veine des deux premiers, ce nouveau tome se joue avec malice des codes Poison Ivy tome 3
Poison Ivy tome 3
associés aux histoires de Seconde Guerre Mondiale, montrant les Allemands comme des Wisigoths caricaturaux qui chantent en lettres gothiques et profèrent des menaces avec un accent à couper à la machette. On savourera ainsi la séquence où une des filles s'interroge : « Ce sont des nazis d'accord, mais vont-ils attaquer une ambulance ? » juste avant qu'un Boche dans son Stuka ne soliloque « Une ampulanze ! Ach ! Chatore tirer zur les ampulanzes ! Tommage qu'on puisse pas les fioler abrès ! » Le reste est à l'avenant, entre explosions, humour noir, jeux de mots et démonstration de super-pouvoirs incongrus. Dans une critique précédente, on vous disait qu'il s'agissait du mariage de X-men et de Drôles de dames. Aujourd'hui, on avancera plutôt un mélange des Morfalous et de Mystery men. Vous voilà bien avancés, il ne vous reste plus qu'à vous procurer les trois albums pour vous faire une idée... Disons en tous cas que l'humour et l'action sont rarement aussi bien mêlés que dans cette série.


La comparaison des deux couvertures est édifiante : sur Tigresse Blanche, l'héroïne est seule, calme, devant un décor immobile qui comprend un hydravion au repos. Sur Poison Ivy, l'héroïne et ses cinq amies courent dans tous les sens, sur fond d'explosion et d'avion en vol. La première série est dans le classicisme bon teint, la deuxième dans l'innovation bien secouée. On remarquera que dans les deux cas, les femmes sont habillées de vert, couleur du mal (le serpent, le diable, tout ça) et du poison, mais aussi de la nature et de l'espoir. Ce qui est sûr, c'est que ces femmes-là ne sont pas vêtues de rose.