8/10O'Boys - Tome 1 - Le sang du Mississippi

/ Critique - écrit par riffhifi, le 08/01/2009
Notre verdict : 8/10 - O'Brothers (Fiche technique)

Tags : boys thirault tome steve sang mississippi philippe

Librement inspirée de Mark Twain, cette réinvention des aventures de Huckleberry Finn sent bon la liberté. Les années 30, le Mississippi... Philippe Thirault et Steve Cuzor signent un premier tome de toute beauté.

Le romancier et scénariste de bande dessinée Philippe Thirault s'associe au scénariste-dessinateur Steve Cuzor pour offrir une vision personnelle de l'univers de Mark Twain : ce premier tome de O'Boys est une adaptation lointaine et libre des Aventures de Huckleberry Finn. Nous sommes au début des années 30, et Huck vit avec son frère Tom (héhé non, pas Sawyer) sous la coupe d'un père alcoolique et violent. Lorsque son père prend la fuite après avoir occis un compère contrebandier, Huck est placé dans une famille bourgeoise et ne fait pas beaucoup d'effort pour se fondre dans le décor... en revanche, il se noue d'amitié avec Charley Williams, un des ouvriers noirs de son père adoptif.


En cette période de Grande Dépression (la deuxième, à vrai dire), avoir dix ans aux Etats-Unis n'est pas simple. Surtout quand on est plus attiré par les « juke-joints » où le jazz flotte dans les vapeurs d'alcool que par la vie rangée des exploitants blancs et par leur élevage de poissons-chats. Peu soucieux des questions de ségrégation et des applications parfois douteuses de la loi par le shérif local, Huck n'a soif que de liberté, de petits zoziaux et de sommeil à la belle étoile. Il entraîne dans sa course insensée un Charley Williams plus préoccupé, plus concerné par les conséquences de ses actes... mais aussi plus susceptible de succomber aux viles tentations qui guettent les gens malheureux.

Ecrit à quatre mains talentueuses (c'est une expression, en vrai on suppose que chacun des scénaristes ne se sert que d'une main), ce premier tome de O'Boys (un titre qui n'est pas sans rappeler le film des frères Coen O'Brother, justement choisi pour accompagner l'album au ciné-BD de ce mois-ci) bénéficie d'un dessin de haute volée par Steve Cuzor, rappelant celui de Jean Giraud (ainsi qu'il est judicieusement indiqué dans le dossier de presse) jusque dans le lettrage et la mise en couleurs (cosignée par Meephe Versaevel). Il ne s'agit pas pour autant d'un Heu non, ça c'est le manche de ta guitare.
Heu non, ça c'est le manche de ta guitare.
travail de copiste, car Cuzor possède une personnalité propre qui transparaît particulièrement dans les scènes de rêves ou d'hallucinations, dont l'album n'est pas avare. Dictées par la fatigue, le sommeil, l'alcool ou la drogue, ces séquences offrent une dimension quasiment fantastique entre deux pics de réalisme documentaire appuyé par la présence de détails bien placés.

Jamais déprimante malgré son contexte social retors, l'aventure de ce Huck Finn qui n'est pas tout à fait celui de Twain s'avère diablement enthousiasmante, et se conclut d'une façon qui annonce une suite encore plus tournée vers le fantastique ; ce deuxième tome placé sous le signe du chemin de fer s'intitulera Deux chats gais sur un train brûlant...