7/10Destins - Tome 1 - Le hold-up

/ Critique - écrit par athanagor, le 16/02/2010
Notre verdict : 7/10 - Gestaltologie (Fiche technique)

Tags : tome destins ellen giroud frank hold greg

Premier tome d'une bande dessinée concept, coordonnée par Frank Giroud, et qui nous en promet pas mal. Les deux tomes suivants sortent simultanément.

Ellen est totalement mordue de Greg, beau garçon ténébreux et révolutionnaire qui distribue de l'essence à la sortie de l'université (dans une station-service). Ce jeune homme l'a envoûtée, non seulement grâce à son physique de Che, mais également en lui racontant son passé de guérilleros humanitaire dans la forêt du Nicaragua. Et ces cheveux longs mmmhhh... Haaaaahhh elle craque ! Le seul hic, et il est mastoc, c'est que le beau gosse est pris. Et pas par n'importe quelle concurrente. Jane Tyler, la nana la plus chaude de l'université, qui passe son temps entre haranguer les foules sur les exactions capitalistes et les bras de son autre amant, un riche représentant d'une compagnie pétrolière. Cette pouffiasse ne méritant décidemment pas le beau pompiste, Ellen fait son possible pour la remplacer dans le cœur de celui-ci. Alors, quand il lui dit vouloir organiser une armée révolutionnaire pour bouger les consciences et que Jane a refusé de l'y rejoindre, Ellen,
sans réfléchir et toute à l'admiration de son héros, se propose pour l'aider dans ses actions.

Si cette BD n'était que le simple étalage des sentiments de cette jeune étudiante pour ce beau mâle révolutionnaire, et des conséquences désastreuses que cela provoque, nous serions déjà en présence d'un assez bon travail scénaristique, assez habilement appuyé sur des considérations psychologiques qui ramènent tout un chacun à revoir ses erreurs de jeunesse. L'engagement et les propos de la jeune fille pour la seule attention de l'être aimé, jusqu'au point de non retour et sans garantie d'affection, sont présentés puis développés avec une belle manière. On a alors l'impression que Frank Giroud témoigne, comme par le biais de cette allégorie, de ses propres erreurs et aveuglement. Puis ce sont celles du lecteur qui refont légèrement surface, comme poussées par un écho.

Le dessin contribuera quant à lui à une immersion bien différente : au tout début, le trait paraît assez sommaire, voire grossier. Mais après avoir pris le temps de quelques pages pour habituer ses yeux, on finit par se laisser emballer, dans une aventure pourtant lente et descriptive. Abstraction faite de la scène de braquage, dont l'urgence est très bien rendue par Michel Durand, l'histoire s'égrène avec patience, grâce à ce dessin qui parvient à entrer en résonnance avec les dialogues, jusqu'à un ressenti empathique envers l'héroïne. Cette jeune fille, le scénario et le dessin arrivent à la
rendre intéressante, car très proche d'un modèle anodin. Ellen n'est ni belle ni moche, c'est la fille dont on finirait par s'enticher pour peu qu'on la connaisse depuis un ou deux ans.

Les quelques pages de ce premier tome suffise à susciter ce sentiment, et on a l'intuition qu'avec la mise en place du fait générateur, c'était là le second but de ce tome 1. En effet, et comme sous-entendu plus haut, ce tome n'est pas seul, car il sort tout de suite accompagné de ses deux tomes suivants, racontant chacun ce que serait le futur d'Ellen en fonction de ses choix, concept Smoking / No smoking, actuellement à la mode avec Mr. Nobody et L'alternative, également chez Glénat. Suivront au total encore 11 tomes, toujours selon cette même logique des possibles, et nous verrons bientôt que, déjà sur la base des trois premiers, le tout est plus que la somme des parties.

Sur ce constat engageant, on espérera une vraie démonstration scénaristique de Giroud. Ne scénarisant pas tous les tomes, il en assure néanmoins la coordination, car le projet de base est le sien. Ce qui titille le plus, c'est l'annonce du tome final, unique, capable de voir s'y rejoindre les différents chemins probables qu'empruntent les destins potentiels, en fonction des choix d'Ellen. Vous vouliez du challenge ?