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9/10Cendrillon - Services et châtiments

/ Critique - écrit par Maixent, le 10/04/2013
Notre verdict : 9/10 - Zouk Zouk (Fiche technique)

Tags : cendrillon tabou livres trif histoire comics tome

On a tous en tête la Cendrillon de Walt Disney avec sa robe étincelante, les souris Gus Gus et Jack tentant de voler maladroitement des perles pour parer la Belle avant d’aller au bal, la citrouille qui se transforme en carrosse dans un tourbillon d’étoiles, les sœurs bêtes et méchantes et la belle-mère odieuse. Maintenant imaginons la même chose sans le filtre Disney mais à travers le regard de Trif, beaucoup plus réaliste, sombre et excitant. Avec une marâtre sadique, Javote et Anastasie en êtres abjectes bien loin du ridicule de Disney sans parler des personnages masculins, tous vicieux ou déviants.

Les contes sont une source d’inspiration inépuisable. Bruno Bettelheim
Cendrillon à la merci des prédateurs
écrivait que « Tout conte de fées est un miroir magique qui reflète certains aspects de notre univers intérieur et des démarches qu'exige notre passage de l'immaturité à la maturité. » Quoi de plus naturel dans ce cas que le monde de l’érotisme se soit emparé de cette manne quasi inépuisable. Le plus souvent ce sont des parodies qui fleurissent comme le film des années 80, Blanche Fesse et les Sept Mains mais il n’est pas rare de trouver une relecture du conte plus proche de l’original, accentuant seulement la part du sexuel ou tout simplement les traits de caractère des personnages.   

La Cendrillon de Trif se situe plutôt dans cette mouvance, dans le plus pur style érotique, sans pénétration mais avec une sexualité diffuse et intellectualisée. On suit le cheminement classique de l’histoire qui s’ouvre sur l’incontournable « il était une fois » mettant l’intrigue en contexte et donnant les informations de base. Mais à peine la page tournée, le lecteur est plongé dans le rôle du voyeur de façon brutale, découvrant une Cendrillon au bain, présentant un corps sculptural rehaussé d’une blondeur virginale du plus bel effet. Très vite le
Un Prince Charmant très occupé
ton est donné, on est plus proche d’un récit sadien que de celui d’un Grimm ou d’un Perrault. Beauté innocente jetée malgré elle dans un nid de pervers, elle ne peut qu’être le jouet de ces êtres sans morale, n’ayant qu’une seule idée en tête l’avilir et la soumettre.

Avec finesse, Trif fait progresser  les tortures physiques et morales éprouvées par Cendrillon jusqu’au point d’orgue lorsqu’elle est surprise en train d’essayer les robes de ses sœurs, ce qui sert d’excuses à toute la maisonnée et principalement à la marâtre de se défouler sur la belle-fille haïe jusqu’à annoncer aux domestiques qu’elle sera leur esclave sans aucune limite. La scène est extrêmement bien amenée avec une violence dans le choix des cadrages, on ressent l’émotion de cette enfant brisée qui n’a plus aucun espoir et une excitation presque malsaine face à sa détresse.  On est happé par l’histoire, incapable de se détourner, espérant sincèrement qu’il ne lui arrive rien mais avec l’envie d’en voir un peu plus.


Une Bonne Fée entreprenante
Si Cendrillon est sans équivoque la figure centrale, les autres personnages ne sont pas oubliés et provoquent également une réelle empathie, avec des personnalités bien dessinées et une histoire esquissée permettant au lecteur de s’identifier. Ainsi le Prince Charmant en libertin blasé ou la Bonne Fée en maîtresse du père captivent le lecteur et apportent une densité cohérente à l’ensemble.

Le dessin quant à lui est d’une rondeur qui convient parfaitement, empli d’un ravissement enfantin mais empreint d’un réalisme ne laissant aucun doute quant à la nature de l’ouvrage. Avec en plus un souci de composition conférant à l’ensemble une tenue parfaite, ce Cendrillon est une œuvre maîtrisée qui remplit ses promesses, réussissant à jouer sur différentes facettes pour tenir le lecteur en haleine.

Il n’était pas évident de s’attaquer à quelque chose connu par cœur par tous et ayant collé à la rétine de tous les enfants mais Trif réussit ce pari insensé de nous faire oublier Disney et de nous rapprocher de Sade. Il n’était pas évident de trouver Cendrillon excitante, cette sotte qui rêve maladroitement au Prince Charmant et qui, à l’instar de Princesse Sarah est toujours pleine de compassion pour ses semblables malgré leur méchanceté et leur sadisme. Mais celle-ci surpasse les souvenirs d’enfants pour s’ancrer dans une nouvelle version tout aussi inoubliable.