Futuropolis : BUMF vol 1, Le voleur de livres

/ Critique - écrit par plienard, le 17/04/2015

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Deux nouveaux albums chez Futuropolis : une satire violente de la société américaine et une critique des milieux culturels parisiens de l'après-guerre.

Bumf, volume 1 – note 5.5/10

Joe Sacco est considéré comme une des figures majeures de la bande dessinée de reportage. Avec des ouvrages comme Palestine (1996) ou Gaza 1956 (2010), ou encore Goradze (2004), il avait fortement marqué les esprits et ne nous avez pas habitué à ce qu’on a lu dans le volume 1 de BUMF.


© Futuropolis 2015.

Paru en 2014 aux Etats-Unis, BUMF, qu’on pourrait notamment traduire par PQ, c’est Sacco qui fait du Robert Crumb. De la satire pure, parfois très trash. A une période où la caricature et le dessin de presse sont devenus les « derniers vrais lieu de libre expression », Joe Sacco s’en donne à cœur joie.

Il est parfois difficile de bien comprendre où l’auteur a voulu en venir dans ce livre où Robert Nixon couche avec Michelle Obama, où Joe Sacco (lui-même) est à deux doigt d’emmener une bombe sur Téhéran et qu’il avoue avant de décoller qu’il ne sait pas piloter un avion, où un général photographie ses fesses pour donner une érection à ses soldats qu’il envoie se battre à poil. Je ne parle même pas du monde parallèle, dans une autre galaxie ...

Tout cela est bien sûr allégorique et est organisée de façon savante – entendez par là : selon la science de Joe Sacco – afin d’avoir un fil conducteur. Les critiques de la guerre et de son absurdité, de la politique, des gouvernements, de la religion bien évidemment et de la société de consommation en général ressortent de cet ouvrage comme une bonne baffe dans la gueule.

Il est cependant difficile de le conseiller à tout le monde. Car malgré une volonté d’être cohérent et organisé, le propos de Sacco n’est pas toujours très intelligible. Et même si depuis les terribles événements de janvier 2015, beaucoup sont devenus des lecteurs de Charlie – mais est-ce que cela durera encore longtemps ? – les nouveaux adeptes de la caricature n’y retrouveront pas forcément leur compte. A ne conseiller qu’à un public averti.

 

Le voleur de livres – note 6/10

Le voleur de livres est un album des premières fois. Première publication aux éditions Futuropolis pour son scénariste Alessandro Tota (rien à voir Ciro Tota) et le premier livre de bande dessinée pour son dessinateur Pierre Van Hove.


© Futuropolis 2015.

Juste dans l’après-guerre, le jeune Daniel Brodin veut être célèbre. Provincial, il vient à Paris faire ses études à la Sorbonne. Son oncle communiste l’héberge à Aubervilliers. Un monde sépare celui de sa famille à celui qu’il rêve d’intégrer, les milieux intellectuels de Saint-Germain des près. Et un soir, il a son moment de gloire, en déclamant un poème devant l’intelligentsia parisienne du café Serbier. Malheureusement cette gloire éphémère se fait sur une imposture. Il a traduit un poème italien que ces gens si cultivés ne semblent pas connaître et qu’il a tiré d’un recueil de poésie qu’il a volé. Car Daniel est sans le sou, et il vole des livres.

Un récit sans prétention qui se moque volontiers des milieux un peu pédants de l’élite de la culture parisienne et qui montre tout le pouvoir attractif de la gloire peut exercer sur un esprit un peu « tendre ». A notre époque Daniel Brodin tenterait peut-être la télé-réalité ! Il va ici connaître une lente descente aux enfers, perdus dans son envie d’être libre et celle d’être célèbre.

Au final, on a un récit un peu froid sur les espoirs un peu follet d’un jeune homme perdu et en mal de reconnaissance. On pourra reconnaitre le physique de Gérard Depardieu dans le personnage de Jean-Michel, un personnage si charismatique alors que le pauvre Daniel est si insignifiant.