Les Aventures de la Mort et Lao-Tseu - Tome 3 - www.la-mort.fr
Bande Dessinée / Critique - écrit , le 13/12/2006 (
Vous êtes seul, reclu dans votre demeure isolée de toutes populations alentours. Lassé de la vie, vous attendez que la grande faucheuse vienne couper définitivement l'herbe sous vos pieds. Mais cette dernière n'arrive pas. Où se trouve donc la Mort ? Elle est là, allongée confortablement dans un cavot avec son fidèle cochon Lao-Tseu à ses pieds. La Mort dort paisiblement. Sa silhouette osseuse prend tout l'espace du matelas. Et lorsqu'elle voit que son réveil n'a pas sonné, le squelette ambulant se presse pour ne pas arriver en retard à son travail. Pas facile de tenir le rythme, mais La Mort sait se préserver physiquement en faisant un jogging quotidien. Elle est soucieuse de conserver la forme sans pour autant rechigner sur les petits plaisirs simples de la vie. La Mort est un bon vivant qui partage volontiers un verre avec les habitués du comptoir. Mais ne venez pas l'agacer au risque de lui faire commettre un geste irréparable.
C'est par le biais des petits plaisirs de la vie que Boucq nous présente une facette peu connue de ce personnage mystérieux symbolisant la Fin. L'auteur décide d'utiliser un ton léger pour débrider un sujet que nous passons volontairement sous silence. La Mort n'est pas présentée comme un être déluré de raison et accro de la faucheuse. A contrario, elle ne revêt pas cet habit lugubre symbolisant le final de notre destiné commune, en prenant une posture noble et grave. La Mort est une personne comme les autres, plus enthousiasmé par la vie par rapport au commun des mortels. Ne lui dites pas qu'elle accomplit la sale besogne, parlez plutôt d'un véritable travail avec ses avantages et ses contraintes. Accompagné de Lao-Tseu, un cochon spirituel partageant le savoir vivre de son compagnon mortuaire, vous pourrez vous faire une image précise de ce que vous présente Boucq.
L'album en lui même ne fait pas spécialement rire, mais il ne ridiculise pas le protagoniste principal. On suit sans effort les situations qui font face à elle. Le personnage a une personnalité et un univers attachant. Dommage que le graphisme ne tienne pas forcement la route même si nous sentons un certain amusement de l'auteur à esquisser ses histoires. Oui le trait de Boucq n'est pas à jeter. Il sait aisement dessiner. Ses acteurs de papier sont suffisement expressifs pour jouer un sketch. La mise en scène demeure classique. Il n'y a pas une recherche particulière au niveau des cadrages pour effectuer un découpage efficace, les plans ne sont pas mal rendus pour autant. Le gros problème de Boucq trouve sa source dans cette horrible coloration transparente réalisée à l'aquarelle. Les teintures sont sans vie ou pas assez détaillées. Pire, le choix des couleurs laisse à désirer au point que certaines histoires montrent des pages peu harmonieuses dans les tons. Mais n'ayez crainte, vous ne serez pas victime d'une hallucination colorée susceptible de vous faire provoquer une crise d'épilepsie.
Les aventures de La Mort et de Lao-Tseu n'est pas une mauvaise bande dessinée. Elle a des atouts qui pourraient charmer aisément les lecteurs. Pourtant, il manque un petit quelque chose. Une pincée de je-ne-sais-quoi qui donnerait envie d'acheter chaque titre de la série. Hélas pour elle, la Mort ne se range pas encore dans la catégorie des BD incontournables, mais de celles qu'on lit aisément lorsqu'on n'a rien d'autre sous les yeux. Boucq n'est pas un amateur dans la matière. Récompensé en 1998 par le prix d'Angoulême, nous pouvons peut-être espérer une amélioration qualitative d'ici les prochains tomes. Ne perdons pas espoir.
La Mort est enfin arrivé. Bon voyage.