Arawn - Tome 3 - La bataille de Cad Goddun
Bande Dessinée / Critique - écrit par athanagor, le 23/02/2010 (Tags : arawn livres ronan breton tome soleil grenier
Ce troisième opus pourrait être celui où le lecteur se lasserait du style too much et sanguinolent utilisé pour raconter ce personnage. Et pourtant...
A peine entré dans ce troisième tome, et simplement accueilli par le désormais traditionnel, bien qu'ici bref, discours d'introduction d'Arawn, on est plongé dans la bataille opposant les armées de celui-ci et d'Engus, son frère, à celle de Math. Dans une débauche de bidoche, d'éclaboussure de sang, d'écrasage de gueule et de tranchage en tranches, les guerriers virevoltent et se maravent la tête à qui mieux mieux, exhibant, qui des muscles improbables, qui un string de combat avec des pointes. Dans cet affrontement, c'est Arawn, doté d'une armée de géants, qui part ultra-favori. C'est du moins ce que s'accordent à dire tous les analystes. Mais deux paramètres ne sont pas fixés. Premièrement, Kern, l'aîné des frères est bien retranché dans le camp de Math, mais il refuse, pour l'instant, d'engager son bras dans cette bataille fratricide. Deuxièmement, Owen, pour qui l'on connaît déjà la future rancœur d'Arawn, doit surveiller le chaudron de sang, que les sinistres évènements semblent exciter.
Toujours dans ce style entièrement assumé d'heroic fantasy barbare, les auteurs continuent à développer l'histoire personnelle du roi de Cymru et de ses frères, tenanciers des trois autres royaumes. Centrant le récit sur cette bataille, charnière dans le destin du personnage, ils lui donnent non seulement l'ampleur de l'événement majeur qu'elle représente dans la mythologie du personnage, mais aussi la valeur de ces faits militaires grandioses, qui font la réputation et l'intérêt des sagas antiques. Ainsi, le découpage de tous les affrontements et épisodes qui peuplent cette journée martiale, où se succèdent l'espoir de la victoire et les apparences de la défaite, font immanquablement penser à l'Iliade et sa succession de rebondissements, seuls faits du caprice des dieux de l'Olympe. Complètement immergés dans la bataille, c'est les oreilles sonnantes que l'on en ressortira, pour assister aux événements subséquents, nous réinstallant dans la ligne de vie de ce personnage imaginaire. C'est tout le cheminement d'une épopée qui prend alors corps dans cette dernière partie, en regard des tomes précédents, dans cette logique narrative particulière qui pourrait presque laisser croire que cet ouvrage aurait sa place dans les contes qu'on raconte aux enfants pour les endormir ; les mêmes qui forgent à la fois leur culture, leur perception du monde et leur imagination.
Bel effort, donc, pour ce troisième tome, qui comme le précédent, laisse imaginer le pire avant d'être parcouru. On pourrait en effet être tenté de croire que, passée la bonne surprise du premier livre, la suite ne saura pas convaincre dans cet étalage de cassage de trognes par des mâles trop baraqués ou des nanas trop bien roulées, où tout le monde campe pieds-nus dans la neige, parce que ça vous a de la gueule. En fait de ça, la ficelle illustrative finit par se fondre dans le propos et accompagner, justement par ses excès, la grandiloquence de la fable. On imagine mal alors comment, pour peu qu'on soit amateur du genre, on pourrait un jour se lasser du travail de Le Breton et Grenier, qui malgré la pompe et l'ampoule qu'ils mettent dans leur récit, ne tournent jamais à vide.