8/1080 jours

/ Critique - écrit par iscarioth, le 22/06/2006
Notre verdict : 8/10 - Comme le disait Churchill... (Fiche technique)

Tags : film jours monde films cinema tour annonce

80 jours est un album de très bon niveau, avec des qualités tant d'écriture que graphiques. Un beau poème sur les thèmes de la vieillesse et du temps qui passe.

Imaginez vous rajeunir d'une année chaque jour. Pour une personne d'un jeune âge, ça ne laisse pas beaucoup de temps à vivre avant de retourner à l'état de foetus. Mais pour un vieil homme de quatre-vingt ans, c'est deux mois et demi à redécouvrir peu à peu sa jeunesse.

A rebours


Le scénario de 80 jours part de cette idée irréelle pour bâtir une fable qui relève plus de l'essai philosophique que de la tentative science-fictionnelle. La marche en arrière racontée dans l'album passe en revue tout ce que l'on perd au fil du temps et que le personnage principal redécouvre en rajeunissant : les sensations, les émotions, la manière de vivre. La décrépitude physique et vitale a bizarrement plus d'impact ainsi contée à rebours. L'album est fort bien écris. Les dialogues comme les encadrés narratifs sont très agréables à parcourir. Les auteurs ont su gonfler le personnage principal en caractère. Edmond, rajeunissant, a envie de croquer la vie. Ses passions sont exacerbées, ses sens, décuplés par la connaissance de la décrépitude et de la fin. On appréciera aussi le gigantisme de certaines scènes symboliques ou cauchemardesques (l'image récurrente d'une voiture en flamme propulsée par monorail, voir ci-dessous).

Le mariage du sale et du propre

Graphiquement, ce one-shot est tout aussi fort en caractère. L'album mêle crayonné très épais et barbouillé à une colorisation informatique tant décriée pour sa fadeur. Sur son site internet, Nicolas Vadot, en nous expliquant la genèse de l'album, nous raconte son parti pris graphique : « Après quelques recherches infructueuses (couleur directe, gouaches, acryliques, écoline, aquarelles, photocopies retravaillées, etc...), je me suis donc tourné vers cette technique du crayonné, en mélangeant du très sale (le crayon gras) à du très propre (l'informatique) ». L'innovation est à saluer, l'auteur tirant ce qu'il y a de meilleur des deux techniques. Le gribouillis des traits au crayon de bois donne de la vigueur et de l'intensité aux visages, tandis que certains effets bien pensés comme les reflets ou fondus (page 20) ne sont permis avec autant d'exactitude que par l'ordinateur. L'album impressionne aussi par sa luminosité et la pertinence de ses plans urbains.


80 jours est un album de très bon niveau, avec des qualités tant d'écriture que graphiques. Un beau poème sur les thèmes de la vieillesse et du temps qui passe.